51llPkVUAbLDans le petit monde du cinéma français, comme vous le savez tous, les malades, ce sont Jacquouille La Fripouille et Godefroy Le Hardi (charmant sobriquet qui leur a été donné par un postier noir, assistant impuissant à la mise en pièce de sa bagnole de fonction) et, dans celui du rock, les malades, ce sont Lux Interior et Poison Ivy. Deux véritables givrés de la cervelle qui n'ont rien, ou alors si peu, à envier Martin Rev et Alan Vega. Le cas de ces tarés de Cramps a déjà été abordé sur le blog, à deux reprises. Clash avait parlé de Songs The Lord Taught Us. Et moi, j'avais abordé le deuxième skeud du groupe : Psychedelic Jungle. En deçà du précédent, mais contenant une sacrée flopée de morceaux de choix. Et, aujourd'hui, je m'y recolle à nouveau, non sans délectation, en abordant le cas du troisième album.

A Date With Elvis, qu'il s'appelle ce disque. Sorti en 1986. Un album d'Elvis Presley, sorti en 1959, portait exactement le même titre. En 1959 ? Elvis était en train d'effectuer son service militaire et ce connard de Parker avait interdit toute publication de nouvelles chansons. Elvis, dans sa piaule de caserne allemande et armé de sa guitare, ne pouvait donc rien pondre de nouveau. Tout ça pour dire que, vue l'absence de nouveau matériel, l'autre enfoiré d'hollandais a fait sortir des albums qui regroupaient des chansons qui avait déjà été diffusées en 45 tours lors des années précédentes. Pour que le public ait sa dose de King, et nique sa mère les doublons.

57221Si j'insiste autant sur Elvis, ce n'est pas pour rien car l'album des Cramps porte vraiment bien son nom. Via ce disque, Lux et Poison rendent un des plus beaux hommages que l'on ait pu rendre au King. Pas musicalement, évidemment, mais vocalement. Rarement le chant de Lux Interior n'aura autant rappelé celui du King. Musicalement ? On évolue dans des sphères bien connues si l'on connaît un minimum les Cramps : le punkabilly. Mélange de punk et de rockabilly, ça ne s'invente pas. Avec Songs The Lord Taught Us, on avait droit à du bien trash du début à la fin. Avec Psychedelic Jungle, c'était encore autre chose. À chaque saignée de guitare, ça sentait la crasse et l'ordure à plein nez. Certains titres de chansons ne faisaient aucun mystère. Avec A Date With Elvis, nouveau changement de registre. Cette fois, c'est de la noirceur combinée à du malaise qui vous attend.

Tiens, vu que l'on parle de malaise, on va causer d'une chanson qui fait très fort dans le genre : People Ain't No Good. Avec les choeurs enfantins lâchant des lalala à plusieurs reprises (dont en introduction), je peux vous assurer que l'on ne se sent pas bien en écoutant ça. D'autant plus que, sur près de 4 minutes, la chanson vous massacre littéralement la tronche. La guitare, plus abrasive que jamais, reste en tête bien comme il faut. Vous connaissez le Mother/Oh Mein Papa de Siouxsie & The Banshees et sa mélodie carillonnante sortie tout droit d'une boite à musique ? En terme de malaise, People Ain't No Good peut la regarder fièrement dans les yeux. Vu qu'on est parti et bien parti, on continue dans le registre du malaise. Can Your Pussy Do The Dog ? Elle aussi, elle vaut des points. Le malaise ne provient pas tellement de ce qu'elle dégage, mais de son titre. Lequel se traduit littéralement par : est-ce ta chatte peut faire le chien ? Oui... un titre pareil est une véritable atteinte au bon goût et a tout ce qu'il faut pour atteindre les esprits les moins entraînés. Et c'est ce que l'on attend de la part des Cramps. En plus, pour parachever l'oeuvre, la chanson est géniale. Addictive comme ce n'est pas permis.

unnamedAllez, maintenant que le moteur tourne à plein régime, j'ai envie de m'attarder sur un doublette absolument terrible. Mes deux chansons préférées de l'album. Je les aime toutes, mais ces deux-là, je les place au-dessus de tout. On commence avec What's Inside A Girl ? Tuerie absolue sur laquelle Lux Interior glapit en mode Baby Let's Play House et comme s'il était carrément possédé par un démon. Une vraie chanson de malade. En plus, avec ces lignes de guitares sorties tout droit d'une caverne infestée de chauve-souris, je ne vous dis pas le tableau. Et il y a, et là, on parle du sommet de la galette : Cornfed Dames. La donne est simple : avec cette chanson, c'est plus de 5 minutes en Enfer qui vous attendent. Je ne veux même pas la décrire, je n'y arriverai pas. La seule chose que je peux dire, c'est que vous allez vous prendre de plein fouet un long tunnel sonore, dominé de la tête et des épaules par une guitare agressive et stridente. Pour le reste, c'est un enchaînement de tueries imparables. Régalez-vous avec le double solo de gratte de The Hot Pearl Snatch. Régalez-vous de Aloha From Hell et bandez un bon coup, bien sec sur (Hot Pool Of) Womanneed et It's Just That Song. Seules How Far Can Too Far Go ? et Kizmiaz (prononcez kiss my eyes) sembleront moins évidentes à la première écoute. Chicken est le seul morceau mineur que vous trouverez ici. Bien balancé musicalement, mais sa courte durée (1'40 minutes) fait que l'on a du mal à le garder en tête. Avec tout ça, on en arrive à la conclusion suivante : ce cru de 1986 va directement s'intercaler entre Songs The Lord Taught Us et Psychedelic Jungle. L'opus de 1980 occupant évidemment la première place.

Face A

How Far Can Too Far Go ?

The Hot Pearl Snatch

People Ain't No Good

What's Inside A Girl ?

Can Your Pussy Do The Dog ?

Face B

Kizmiaz

Cornfed Dames

Chicken

(Hot Pool Of) Womanneed

Aloha From Hell

It's Just That Song