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De temps en temps, vraiment pas souvent, je propose des bande originales de films. Y'à paslongtemps, c'était avec la bande originale du film La Fièvre Du Samedi Soir, et encore un peu avant, Shining de Kubrick, deux réécritures. Pour cette fois-ci, et pour demain aussi d'ailleurs, c'est avec du neuf que je déboule. Si vous êtes cinéphile, ou tout du moins si vous aimez les films fantastique et d'horreur/épouvante, alors il est évident que si vous me répondez ah ! tiens, le film dont tu va aborder la bande originale aujourd'hui, je ne l'ai jamais vu, j'aurai du mal à vous croire. Enfin, c'est peut-être votre cas, et dans ce cas, je ne peux que vous conseiller de rattraper ce retard une fois cet article (qui ne spoile pas le film, on n'est pas là pour ça) lu. L'Exorciste, sorti en 1973, réalisé par William Friedkin, est en effet le genre de film qui parlera à tout le monde. Un film culte, qui sera un succès tellement prodigieux qu'on dira à son réalisateur pour ton prochain film, fais ce que tu veux, tu as carte blanche. Il fera Sorcerer, sorti en 1977, qui aura le destin maudit que l'on sait peut-être et est son chef d'oeuvre, mais c'est autre chose. A noter que la même chose est arrivée en 1973 avec John Boorman, qui fera le film qu'il voulait faire après le succès, deux ans plus tôt, de son Délivrance, et ça donnera le mal-aimé Zardoz ; on reparlera de ce réalisateur demain, enfin, on parlera surtout du film qu'il fera la même année que le Sorcerer de Friedkin, car il s'avère que ce film de Boorman sera...mais patientez jusqu'à demain !

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Friedkin réalise donc L'Exorciste, adaptation d'un best-seller assez froidement écrit par William Peter Blatty. On ne va pas revenir sur l'histoire : un cas de possession démoniaque sur une petite fille d'une douzaine d'années, jeune Américaine vivant dans une banlieue très chic de Washington, et qui va vivre un enfer. Le film fait partie des rarissimes films d'épouvante qui, vraiment, malgré mon âge (né en 82), le fait que je ne suis pas particulièrement impressionnable en général, et le fait que j'ai vu ces films tellement de fois (ainsi que pléthore d'autres films de ce genre) qu'ils ne devraient plus rien me faire, et bien, malgré tout ça, ces quelques films que je vais citer continuent de me retourner comme une crêpe à la Chandeleur : La Maison Du Diable, Shining (de Kubrick), Le Locataire (de Polanski), Carnival Of Souls...et L'Exorciste. Ainsi que le troisième volet de la saga L'Exorciste, d'ailleurs. Souvent, ces films bénéficient d'une bande originale au diapason, qui fout les jetons bien comme il faut. C'est le cas du Polanski, du Kubrick...c'est le cas du Friedkin aussi. Souvent, avec L'Exorciste, on fait un amalgame : Tubular Bells. Cet album, sorti en 1973 (mais avant le film), est le premier album solo de Mike Oldfield, musicien multi-instrumentiste (mais surtout guitariste) britannique. Un album majeur qui offre, en une cinquantaine de minutes passionnantes, diverses ambiances, celtiques, progressives, délirantes, rock, acoustiques... L'album s'ouvre sur une mélodie entêtante, doucereuse, au piano. Ce passage d'environ 5 minutes (sur les 48 de l'album !) sera utilisé pour L'Exorciste, et est devenu emblématique du film, presque sa musique de générique. On le retrouvé évidemment sur l'album que j'aborde aujourd'hui, mais n'a pas été conçu pour le film, mettons les choses au clair (de lune à Maubeuge).

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Oldfield va voir sa carrière décoller suite à cette utilisation (faite avec son accord) du premier thème de son Tubular Bells. Vu que le film a été un triomphe mondial, tout le monde avait cette mélodie à la fois douce et angoissante en tête. A la base, Fridkin avait demandé à Lalo Schifrin, fameux compositeur argentin, de faire la bande originale, mais il n'aimera pas ce qu'il entend, et se tournera, comme Kubrick le fera dès 1968, vers des musiques pré-éxistantes. C'est ainsi que sur The Exorcist Soundtrack, on entend donc du Oldfield, mais aussi et surtout du Penderecki. Krzysztof Penderecki est un compositeur polonais de musique contemporaine, un chef d'orchestre aussi, qui a signé quelques morceaux vraiment angoissants. Plusieurs d'entre eux seront utilisés par Kubrick pour Shining. D'ailleurs, quand j'avais réabordé l'album de la bande-son de Shining, je précisais que dans le film de Kubrick se trouvaient des extraits d'un morceau de Penderecki, Polymorphia, qui ne se trouvait pas sur l'album en raison de sa durée (presque 12 minutes) et de la durée de l'album (presque 50 minutes). Polymorphia avait déjà été utilisé en 1973 par Friedkin pour son film et est présent ici, sur l'album The Exorcist Soundtrack, en version complète (notons aussi que les deux films sont des productions Warner, ainsi que leurs albums ; Warner a sans doute estimé que comme ce morceau était sur l'album de la bande-son de L'Exorciste, faire un doublon en le mettant sur celui de Shining aurait été idiot). Polymorphia est angoissant, et les deux autres morceaux de Penderecki utilisés ici, String Quartet (1960) et Kanon For Orchestra And Tape, respectivement 7 et 9,45 minutes (l'album, dans sa totalité, pour 10 titres, dure 45 minutes), sont du même acabit : stressants, dissonants (volontairement), ce sont des sommets de musique contemporaine qui, dans le film, fonctionnent parfaitement. Le reste de l'album utilise des bribes de morceaux de Henze, Webern et Crumb, excellents (Fantasia For Strings : générique de fin du film), et l'album s'ouvre sur Iraq, un morceau composé par Jack Nitzsche et comprenant notamment un appel à la prière musulman et des effets sonore (voir le prologue du film) mais clairement, la viande de cet album de bande originale, c'est Penderecki...et le fameux morceau de Mike Oldfield. Cette bande-son est glaçante, efficace, un parfait complément à ce chef d'oeuvre du cinéma, qui serait peut-être un peu moins flippant sans elle (mais flippant quand même). 

FACE A

Iraq

Tubular Bells

Five Pieces For Orchestra

Polymorphia

FACE B

String Quartet (1960)

Windharp

Night Of The Electric Insects

Kanon For Orchestra And Tape

Tubular Bells

Fantasia For Strings