Revoilà, pour une courte période (trois albums), Rod Stewart sur le blog. Il a été pas mal à l'honneur sur Rock Fever récemment, par mon biais et celui de MaxRSS, mais il y à trois albums que je voulais faire depuis un sacré bail, alors autant en profiter pour les aborder maintenant. Trois albums que j'affectionne particulièrement, surtout les deux premiers, trois disques sortis l'un après l'autre (ils se suivent dans la discographie de Rod The Mod) et qui ont pas mal de choses en commun, notamment le fait d'être, enfin selon moi, les derniers bons disques d'un chanteur compétent, talentueux, capable, mais ayant par la suite vautré sa carrière avec des trucs vraiment pas glorieux (certes, avec des tubes à la clé, comme Passion, Baby Jane ou D'Ya Think I'm Sexy ?, mais l'ensemble de ses albums, après cette trilogie que j'aborde dès aujourd'hui, est vraiment déplorable). Après avoir quitté les Faces en 1974 (en fait, le groupe s'est autodétruit, progressivement), Rod se retrouve à ne gérer que sa carrière solo, et le premier album de lui à sortir alors qu'il n'est plus qu'un artiste solo (encore qu'officiellement, les Faces se séparent en 1975, mais en 1974, ils sont complètement à plat), c'est Smiler en 1974, que j'ai abordé le mois dernier. Un disque que j'aime bien, correct, mais qui se fera pétarder bien comme il faut, à l'époque (la première fois qu'un de ses albums se fera allumer de la sorte par la presse). Smiler sera son dernier album sur son ancien label Mercury. Il passe ensuite à la vitesse supérieure et signe sur Warner Bros (les Faces, au passage, étaient sur Warner !), et son premier album sur ce label sort en 1975. C'est celui-ci, Atlantic Crossing.
La pochette donne le ton (et est franchement hideuse) : un Rod gigantesque qui franchit l'Atlantique à grands pas, comme s'il avait des bottes de sept lieues. Couleurs pastel et clinquantes, ambiance glam décadente, mauvais goût assumé, je ne sais pas, toujours est-il que c'est vraiment une pochette que je trouve ridicule...mais qui, en même temps, veut bien dire ce qu'elle dit : Rod débarque aux USA (l'album a été enregistré à New York, Miami et aux mythiques Muscle Shoals Sound Studios de Sheffield, Alabama, bref aux States), préparez-vous, planquez vos filles et vos soeurs, sortez vos carnets à autographes et courez le voir en concert. Tout l'album, qui dure 44 minutes, est conçu pour plaire aux masses, et est savamment construit autour d'une face rapide (la première) et une face lente (ben, forcément, la seconde). Ce qui sera aussi le cas des deux albums suivants (enfin, surtout le suivant). C'est à la suggestion de celle qui, à l'époque, partageait la vie de Rod, l'actrice suédoise Britt Ekland, que l'album sera agencé de la sorte, et le moins que l'on puisse dire, c'est que ça fonctionne (en 1981, les Stones ne feront pas autre chose pour leur Tattoo You). Rod Stewart oblige, on a ici pas mal de reprises : Drift Away (sur la face rapide), qui sera par la suite, en 1998, repris par Ringo Starr (mais aussi par plein, plein, tout plein de groupes ou d'artistes, comme Springsteen, les Stones, Ike & Tina Turner, Roy Orbison, Ray Charles et Michael Bolton), est un classique de la country. Sur la face lente, on a I Don't Want To Talk About It de Crazy Horse (le groupe accompagnateur de Neil Young fera des albums sans le Loner), This Old Heart Of Mine des Isley Brothers, It's Not The Spotlight de Barry Goldberg et surtout, le tube de l'album et une des plus grandes chansons de Rod, Sailing, à la base une chanson de Gavin Sutherland, de 1972. Achevant l'album, cette chanson mémorable est sans doute une de mes préférées de tous les temps, une pure perfection mélodique, Rod n'a que rarement aussi bien chanté qu'ici. Je préfère m'arrêter là pour ne pas dire trop de conneries à son sujet, la chanson est si sublime...que ça se passe de commentaires superflus.
Photo de la sous-pochette, où Rod semble comme songeur, ou fatigué...
Atlantic Crossing, dans sa globalité, est une réussite, un des meilleurs albums du chanteur, ici entouré de musiciens hallucinants (Steve Cropper, Donald 'Duck' Dunn et Albert Jackson des M.G.'s de Booker T., qui joue aussi dessus, Lee Sklar, Jesse Ed Davis, Barry Beckett, les Memphis Horns, Nigel Olsson, Pete Carr) et servi par une production éblouissante du grand Tom Dowd (Derek & The Dominoes, Cream, Allman Brothers Band). Les chansons, rapides (Three Time Loser, Drift Away, All In The Name Of Rock & Roll) ou lentes (Sailing, This Old Heart Of Mine, Still Love You), sont géniales, aucune n'est mauvaise, aucune n'est à retirer du lot, Atlantic Crossing est un disque cohérent, solide, vraiment bluffant. L'album sera, surtout après un Smiler mal reçu par la presse et considéré comme putassier (il faut dire que sa reprise, adaptée en version masculine, du (You Make Me Feel Like) A Natural Woman de Carole King y est gratinée), un gros succès commercial et critique, Rod, pour son premier album post-Faces, pour son premier album 'ricain' et son premier chez Warner, frappe un grand coup d'épée, qui ne va clairement pas dans l'eau. La suite sera pour moi du même tonneau, avec un disque très solide en 1976, j'en reparle bientôt ici...
FACE A ('fast side')
Three Time Loser
Alright For An Hour
All In The Name Of Rock & Roll
Drift Away
Stone Cold Sober
FACE B ('slow side')
I Don't Want To Talk About It
It's Not The Spotlight
This Old Heart Of Mine
Still Love You
Sailing