C'est donc aujourd'hui que je m'y colle : à la rédaction de la chronique du nouvel album de Renaud. Et je dois vous dire un truc : je n'avais franchement pas envie de l'aborder, ce nouvel album, pir la simple et bonne raison qu'à la base, je n'avais tout simplement pas l'intention de l'acheter, et même de l'écouter. Mais que voulez-vous, trop bon/trop con. Il y à quelques jours, j'entends, à la TV, dans un reportage du 20H de TF1, un ou deux extraits, courts, des nouvelles chansons de Renaud (oui, je sais, on pouvait entendre et regarder, sur le Net et ailleurs, son premier single promotionnel depuis un petit moment, mais est-ce que je vous ai déjà dit que je ne comptais pas écouter cet album ? Ah, je me disais bien), et je me suis mis à grimacer en me disant bon ben, j'adore ce que Renaud a fait de 1977 à 2002, mais franchement, là, je passe mon tour. Je ne voulais pas me faire avoir encore une fois. Je me suis fait avoir en 2006 par Rouge Sang, acheté en édition double CD collector avec plusieurs chansons inédites (l'album, qui m'a dans un premier temps emballé, s'est avéré être une daube insipide malgré quelques bonnes chansons). Ca commençait déjà à sentir la fin, cet album. Puis Molly Malone - Balade Irlandaise, quelques années plus tard (2009), disque de reprises d'airs irlandais, adaptés en frouze. Musicalement, rien à dire. Vocalement, c'est le premier album studio de la Chetron Sauvage au sujet duquel on peut vraiment dire mais il chante vraiment mal, putain. Après ce disque (qui ne sera pas un succès monstrueux), Renaud, alors dans une nouvelle mauvaise passe (séparé d'avec Romane Serda en 2011, il replonge dans la tise, qui avait été son Enfer personnel de 1994 à 2001). On le croit alors fini, vidé, lessivé. Lui-même le croit sans doute, ce qui est pire.
Et puis, tel un phénix qui renaît de ses cendres (et la pochette de l'album en question est à ce titre sans équivoque), Renaud revient, tant bien que mal, en 2016, avec Renaud, album sans titre donc, sur la pochette duquel il pose, impérial mais ayant clairement encaissé, tenant entre ses mains un phénix dessiné par-dessus la photo). J'ai acheté l'album au moment de sa sortie, et l'ai abordé ici quelques jours plus tard. Vous vous souvenez sans doute de la chronique, elle est classée dans les 'ratages', et j'y assaisonnait bien l'album, avec un sale goût dans la bouche. Un démontage en règle qui ne me plaisait pas, car ce nouvel album (qui a cartonné, comme on pouvait s'y attendre et l'espérer), je ne voulais pas le démonter ainsi. J'y croyais tellement, mais au final, vlan, rien. Ou presque rien, quelques (rares) très bonnes chansons comme Mulholland Drive et le single promotionnel Toujours Debout, qui fait illusion et est vraiment réussie. L'enregistrement se passa, apparemment, d'abord assez mal (Renaud, certes très motivé pour revenir - depuis plusieurs mois, progressivement, il refaisait parler de lui, via des chroniques dans des journaux, des collaborations, la sortie d'une compilation, etc - n'était pas dans une forme olympique), puis de mieux en mieux, et à l'écoute de l'album Renaud, on s'en rend compte : sur certains titres (Les Mots), il sonne épouvantablement, tandis que sur d'autres (le single), ça va. Pas Byzance, il ne chantera plus jamais comme autrefois à cause de ses excès d'alcool et de clopes, mais ça allait. J'ai écouté cet album une poignée de fois, avant de l'aborder, et dans diverses conditions (seul, accompagné, en voiture, sur ma chaîne hi-fi, au casque), et chaque écoute m'a fait de plus en plus me rendre compte qu'en fait, c'était pas bon, boursouflé, consensuel (Hyper Cacher, chanson nullissime sur un sujet qui méritait mieux... Lavilliers, sur le même sujet, a, lui, fait un truc réussi, Vendredi 13, sur les autres attentats de 2015), et comme je le dit dans ma fin de chronique, je n'en pouvais plus (et c'est toujours le cas), de l'album, au bout de quelques écoutes. Un retour certes cartonneur, mais raté.
Renaud a fait une tournée, immortalisée par un album live que je n'ai pas écouté (et encore moins acheté, donc), pressentant que je serais déçu, voire pire (apparemment, c'est épouvantable, vocalement parlant). Pour moi, donc, Renaud, c'était fini, un artiste du passé, ruiné par des abus d'alcool et de clopes et des désillusions personnelles. Aussi, quand Renaud a annoncé en 2018 qu'il allait revenir avec un nouvel album, je me suis dit ça sera probablement sans moi, mec. Un album qu'il annonçait comme fait pour les enfants (mais qui, en fait, est selon ses mots plus un album sur les enfants que pour les enfants). Le projet semble engagé (Renaud a enregistré ses voix chez lui, à L'Isle-Sur-La-Sorgue, tandis que les musiques ont été enregistrées à Paris, et le tout mixé en studio parisien) mais Renaud suit deux gros coups au coeur : la mort, quasi simultanée (un mois d'écart, je crois), de son grand frère Thierry Séchan et de leur mère. Quiconque encaisse telles tragédies, surtout avec un passif aussi lourd d'alcoolisme et de dépression, ne s'en remettrait pas. Mais Renaud semble avoir été refait en airain depuis 2016. Il s'en remet, difficilement (le voir, maintenant, fait mal, très mal, très très mal). Le bonhomme se permet même une nouveauté, le concernant : produire un album d'un autre artiste, de Dave en l'ocurrence, lequel vit non loin de chez lui. Je n'aborderai pas l'album de Dave (vous vous en doutez, hein, que c'est pas ma came), mais apparemment, ça serait un de ses meilleurs albums, au Batave. Et ça permet à Renaud de revenir en douceur tâter le terrain, quelques mois avant la sortie de l'album. Il annonce, en juillet dernier, le titre de l'album, et une date de sortie approximative. Le disque sort donc le 29 novembre, sous une pochette dessinée par Zep, qui en est à son deuxième album après le Chansons Pour Les Pieds de Goldman en 2002 (ou 2001 ?). Les Mômes Et Les Enfants D'Abord, chouette titre, sort dans trois (quatre en comptant, aussi, le téléchargement MP3) formats. Le CD, dans un boîtier-livre (du même format que l'album de 2016, plus haut qu'un boîtier CD classique) avec un livret illustré (par Zep, donc) de 56 pages ; le vinyle, double, pochette ouvrante, les paroles sur les sous-pochettes, mais pas toutes les illustrations car pas la place ; et un coffret regroupant le CD, le vinyle, un porte-clés en résine, dessiné par Zep, de Renaud, et quatre tirés à part de Zep, format 30X30 (un peu plus petit qu'une pochette vinyle), cartonnés. C'est ce coffret que j'ai acheté.
Car j'ai acheté le bouzin. Moi qui m'étais promis de stopper les frais renaudiens, d'arrêter de me faire du mal et donc, de ne pas acheter ce nouvel album dont je n'attendais strictement rien car je n'y croyais plus, je me suis finalement laisser avoir. Je l'ai acheté, hier, dans son coffret collector (pour 39,99 €). Notons que dans le vinyle a été glissé le CD de l'album dans une pochette cartonnée cheap, on a donc deux fois le CD en achetant le coffret (et que vous preniez le CD ou le vinyle, vous aurez de toutes façon le CD) ! Long de 41 minutes (12 titres ; aucun changement entre le CD et le vinyle, pas de rajouts ou de manques, même tracklisting), le disque est définitivement trop court pour un double vinyle, surtout que les quatre faces sont occupées, 10 minutes environ par face. Mais il a en revanche une durée parfaite, pas long, cohérent. C'est un disque sur l'enfance, donc, il suffit de lire les titres des chansons pour le deviner. Et alors qu'on en est au quatrième paragraphe, je commence donc tout juste à parler de l'album, et vous devez donc vous demander si c'est, ou pas, un ratage. Allez donc voir rapidement en bas d'article, dans quelle catégorie j'ai rangé la chronique, et ensuite revenez lire la suite. Je suis sympa, je vous fait un repère visuel [] Voilà. Alors, que vous ayez été vérifier ou pas, m'en fous, je le dis, oui, ce disque n'a pas été classé dans les 'ratages'. Vous pouvez penser que c'est pour ne pas tirer sur l'ambulance et enfoncer Renaud encore une fois, mais, sincèrement, non. Récemment, dans un commentaire sur un article sur le blog (où exactement, je ne m'en souviens plus), je disais à MaxRSS, qui écrit de super choses ici depuis un peu plus d'un mois, que j'allais sans doute aborder l'album de Renaud (en fait, à ce moment-là, je n'étais même pas sûr de le faire, vu que je ne comptais pas vraiment écouter le disque), et que ça risquait sans doute d'être douloureux. Je m'attendais en effet à un naufrage. Et puis je me décide de passer à côté du disque. Et puis je l'achète quand même et l'écoute, de retour chez moi, les dents serrées. Et puis, 41 minutes later, je range le second vinyle dans sa pochette en me disant que c'était pas si terrible que ça.
Car c'est, en effet, pas si terrible que ça. Renaud ne chantera jamais plus aussi bien qu'autrefois, à cause de ses abus (qui, désormais, semblent vraiment derrière lui), mais je trouve qu'il ne chante pas moins bien que sur l'album de 2016. J'ai eu même l'impression qu'il chantait un petit peu mieux, ce qui est peut-être subjectif, mais en tout cas, against all odds comme le chantait Philou, je n'ai pas grimacé en écoutant le disque. J'ai souri comme un petit con en l'écoutant raconter les déboires sentimentaux d'un obsédé sexuel dans Pinpon (putaing con !), et d'une manière générale, malgré une paire de chansons médiocres vers la fin (Le Petit Crabe Et La Langoustine, dans une moindre mesure C'Est La Récré avec sa chorale d'enfants faisant le refrain, ce qui est malgré tout une bonne idée), Les Mômes Et Les Enfants D'Abord est cohérent avec lui-même (c'est un disque conceptuel) et d'une bonne tenue...pour peu qu'on accepte deux choses : la voix de Renaud, peut-être pas pire qu'en 2016 mais tout de même pas géniale ; et le fait que l'album parle des enfants, aux enfants (avec des gros mots), et même si l'album n'est pas destiné qu'à eux (comme le dit Renaud dans le petit texte accompagnant l'album), c'est quand même, rien que pour ça, un album à part pour Renaud, comme A Cause D'Elles était un disque à part pour Souchon. C'est en tout cas un disque très touchant (L.O.L.I.T.A. sur sa fille, Parc Montsouris), drôle (Ca Va Gueuler sur un enfant qui enchaîne les conneries, difficile de ne pas penser à la création de Zep, Titeuf, représenté gueulant Tatatiiiiin sur un des dessins offerts dans le coffret collector), sans complaisance (On Va Pas S'Laisser Pourrir parle des addictions, Renaud les a foutues derrière lui désormais, définitivement on l'espère), parfois un peu engagé (Y Z'Ont Mis L'Feu A L'Ecole parle de ce faits divers d'une école incendiée par des jeunes cons qui voulaient plus y aller), rarement en fait, car ce n'est pas un album ordinaire pour Renaud.
Les Mômes Et Les Enfants D'Abord est un disque que je ne pensais pas aimer (tout du moins apprécier) et qu'au final, j'apprécie. Loin d'être le meilleur album du chanteur (soyons sincères, les hauteurs de Morgane De Toi, Mistral Gagnant sont très loin), ce n'est pas un de ses pires, c'est un album dans la bonne moyenne, que je sais que je pourrais réécouter sans (trop de) problèmes d'ici quelques temps, alors que l'album de 2016, tout comme Rouge Sang, je ne peux tout simplement plus le sortir de son boîtier. C'est une bonne surprise, qui redonne un peu espoir, même si on sent quand même que la bestiole est fatiguée, usée par la vie (qui ne lui a pas fait de cadeaux l'an dernier) et les abus du passé. Mais ce disque a tout du sursaut d'orgueil, du baroud d'honneur. J'espère que Renaud refera un disque. Si ce n'est pas le cas, cet album sera dans ce cas un final sympathique et totalement respectable, bien plus agréable à écouter que le pensum consensuel et bancal contenu sous la pochette dite au phénix, de 2016. Je pense cependant que certains se sentiront déçus, frustrés par ce nouvel album. En partie parce qu'il parle des enfants et que les paroles (bien écrites au demeurant) sont simplistes, comme écrites par des enfants, c'est bien entendu volontaire mais je peux comprendre que ça en gêne certains. Rien que pour ça, aucune des 12 chansons de l'album n'a la force, la puissance des meilleures chansons de Renaud. Et puis certains diront mais sa voix, putain, il n'en a plus, de voix, il faut suivre les paroles dans le livret pour comprendre ce qu'il marmonne. Là aussi, je peux piger. Oui, c'est le défaut du disque : la voix. Mais Renaud n'a jamais été un ténor d'opéra, il n'a jamais été un chanteur à voix, et les abus du passé font que, de ce côté-là, ça ne sera jamais plus pareil ni mieux que par le passé, donc, hé bien, il faut faire avec. J'ai fait avec. Et vous ?
FACE A
Les Animals
Pinpon
L.O.L.I.T.A
FACE B
J'Aime Rien
Mes Copains
On Va Pas S'Laisser Pourrir
FACE C
Y Z'Ont Mis L'Feu A L'Ecole
Le Petit Crabe Et La Langoustine
Y'A Un Monstre Sous Mon Lit
FACE D
Ca Va Gueuler
C'Est La Récré
Parc Montsouris