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Vous n'aimez pas A-Ha ? Courage, dans ce cas, c'est bientôt fini : cet article et un autre dans une poignée de jours, et vous pourrez respirer. Mais si vous aimez bien ce groupe norvégien aujourd'hui bien oublié des masses (leurs hits passent encore à la radio, enfin, au moins deux d'entre eux, les premiers, mais ils continuent gentiment leur carrière dans une indifférence presque aussi totale que vous ne pouvez l'imaginer), vous pouvez pleurer, car une fois que le petit cycle (qui s'achève avec le prochain article, donc) sera fini, ça en sera vraiment fini de A-Ha sur le blog, je n'ai en effet pas du tout l'intention d'aborder les albums suivants. Pour l'album qui nous intéresse aujourd'hui, c'est un disque sorti en 1990 et qui marque une sorte debon gros changement de perspective musicale pour le groupe de Pal Waaktaar-Savoy (guitare) et Morten Harket (chant). Les trois premiers opus étaient de la pure synthpop garnie de tubes (enfin, un peu moins le troisième, qui était une petite déception), de la synthpop bien calibrée et ayant, ma foi, assez bien vieilli, bien mieux vieilli que les albums de, disons, Duran Duran. Avec ce disque, on quitte donc les années 80, on dit bonjour à la nouvelle décennie. 

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Le moins que l'on puisse dire, c'est que, rien qu'avec sa pochette, East Of The Sun, West Of The Moon (le titre est aussi celui d'un conte pour enfants très connu en Norvège) détonne par rapport aux précédents opus, surtout les deux premiers. Finies les pochettes à la fois glamour et recherchées, place à un groupe qui pose, en noir & blanc, dans un décor des plus minimalistes (une butte de terre, le haut d'une colline ?), bien fringués (l'un d'entre eux ressemble tellement à un barman parisien que j'ai envie de lui commander une bière sans faux-col), mais regardez quand même : l'un d'entre eux, le chanteur, arbore un bandeau de pirate ; et un autre arbore une barbe de 15 jours et porte négligeamment sa chemise, qui bouffe sur son col, un peu ouverte. Et ces tronches... On dirait les Beatles de Beatles For Sale, les Depeche Mode de Ultra (album qui ne sortira que 7 ans plus tard), la fatigue semble là. La fatigue ou une certaine résilience face au fait accompli : en 1990, A-Ha semble être, déjà, un objet du passé. Oh, bien sûr, Take On Me passe encore à la radio en 1990 (Hey ! C'est toujours le cas en 2019, alors...), mais le grunge ne va pas tarder à débouler, le hard-rock revient en force, alors A-Ha... Pourtant, ce quatrième opus offre, en intro, du lourd : une reprise, efficace et surtout respectueuse, du Crying In The Rain des Everly Brothers. Etonnant de la part du groupe, de reprendre ce morceau, surtout sans le passer à la sauce a-haienne (trois ans plus tôt, ce morceau aurait, sans doute, été noyé dans les synthés séquenceurs), mais ça fonctionne.

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Tout du long de ses 44 minutes, East Of The Sun, West Of The Moon, que j'aurais bien envie d'abréger en EOTSWOTM mais ça ferait con, offre 11 titres qui, ma foi, sont excellents, plus sobres et matures (rien que le chant de Harket est moins empreint de ces roucoulades de minet en rut qui, à la longue, étaient un peu usantes) que sur les précédents albums. I Call Your Name (pas une reprise des Beatles, je le précise), (Seemingly) Nonstop July, Early Morning, de très belles chansons, la meilleure étant incontestablement Rolling Thunder à mes oreilles. Dans l'ensemble, ce quatrième opus est probablement un de leurs meilleurs, avec Scoundrel Days et le suivant, Memorial Beach (1993), ce dernier étant, en fait, certainement le sommet (méconnu) de leur discographie. Ne vous fiez donc pas à AllMusic qui, à partir de 1990, semble dire, via ses notations, que la musique de A-Ha plonge dans la merde. Certes, après 1993, c'est moyen au possible, mais entre 1990 et 1993, c'est, on peut le dire, une sorte de parenthèse enchantée. Peu connu, peu écouté, cet album mérite amplement la (re)découverte. 

FACE A

Crying In The Rain

Early Morning

I Call Your Name

Slender Frame

East Of The Sun

FACE B

Sycamore Leaves

Waiting For Her

Cold River

The Way We Talk

Rolling Thunder

(Seemingly) Nonstop July