Attention, gros bloc en perspective. Pas l'article en particulier, même si rien que le tracklisting en bas d'article prend autant de place que l'article lui-même (et même encore plus de place, en fait). Mais cet album est un gros bloc, voilà. D'ailleurs, ce n'est pas un album, mais une compilation, sortie en 1991 et depuis maintes fois rééditée. Une compilation de presque quatre heures, constituée de trois disques bien remplis, dans les 77 minutes chacun, 58 titres en tout et aucun doublon parmi eux. The Bootleg Series 1 - 3 : [Rare & Unreleased] 1961 - 1991 est le premier tome de la désormais fameuse, et constituée à l'heure actuelle de 13 volumes (cette première compilation regroupant les trois premiers volumes, on a en fait 11 compilations distinctes), des Bootleg Series de Bob Dylan. Les Bootleg Series, c'est l'arme nucléaire absolue pour tout fan de Dylan : on y trouve des lives géniaux, des prises alternatives, des morceaux inédits, des raretés... Certains des volumes sont des essentiels absolus, voir le volume 4 (c'est à dire le second BS sorti) qui propose le concert du Trade Hall de Manchester 1966 (faussement appelé 'Royal Albert Hall Concert', car pendant des années on croira que ce concert, disponible autrefois en bootleg, était celui du Royal Albert Hall), avec un Dylan en surpuissance électrique ; voir le volume 11, proposant, en un gros et onéreux coffret, l'intégralité des fameuses Basement Tapes de 1967 ; voir le volume 6 : un live de 1964, sublime ; voir le volume 5 : un live de 1975, durant la Rolling Thunder Review, excellentissime ; voir...mais vous avez compris. Même les sessions de Self Portrait y ont eu droit (volume 10, qui permet de quelque peu réhabiliter le polémique double album de 1970).
Sorti en 1991, ce triple album, ces trois premiers volumes en un seul, est assurément un des plus essentiels parmi les volumes des BS. On y trouve des morceaux inédits (parfois en live) ou des prises alternatives de morceaux connus, morceaux présentés de manière chronologique de 1961 (avant la sortie du premier album, éponyme et médiocre, de Dylan) à non pas 1991 comme indiqué dans le titre, mais 1989 (sessions de Oh Mercy, un seul titre). Précisons d'ailleurs que si la période concernée est d'environ 30 ans, le premier disque va de 1961 à 1963 et contient 22 titres ; le second disque, de 1963 à 1974 en 20 titres (et seulement 6 titres pour les années 70) ; et le troisième disque, de 1974 à 1989, en 16 titres (et pour les années 80, 11 titres). On a donc plus de matos pour la seule décennie 60 que pour les deux autres, ce qui n'est pas étonnant : Dylan s'est longuement produit sur des petites scènes de Greenwich Village et au cours de festivals folk avant de sortir son premier album, puis entre chaque album, il il a tellement enregistré de morceaux, originaux ou reprises de standards et de vieilles chansons oubliées, qu'il ne pouvait pas tout mettre sur un disque, même si ses premiers albums, et d'une manière générale ses albums d'ailleurs, atteignaient 50 minutes (et une douzaine de titres). Ici, je ne vais pas entrer dans le détail. Si certains morceaux sont anecdotiques (on évitera de se pencher sur Talkin' Hava Negellah Blues, de même pas une minute, et les 7 minutes de la déclamation live, a capella, de Last Thoughts On Woody Guthrie sont parfois bien longues...), dans l'ensemble, c'est du Dylan concerné et en forme qu'on a ici. Avec une qualité audio exceptionnelle du début à la fin.
No More Aunction Block (sur l'esclavage), le polémique Talkin' John Birch Paranoid Blues que le Barde fera retirer de The Freewheelin' Bob Dylan (1963) avant le pressage de l'album (la première édition de l'album avait le titre du morceau crédité sur la pochette, qui avait déjà été imprimée, elle), Who Killed Davey Moore ?, le rigolo mais mineur Talkin' Bear Mountain Picnic Massacre Blues (quel titre maladroit...), des prises alternatives de ses classiques The Times They Are A-Changin', It Takes A Lot To Laugh, It Takes A Train To Cry ou Idiot Wind, des morceaux aussi rares et réussis que Catfish, Golden Loom (issus des sessions de Desire), des morceaux issus, aussi, de sa période chrétienne (Every Grain Of Sand dans une autre version), et aussi et surtout, joyau ultime de ce triple volume, morceau qui à lui seul justifie l'achat du bouzin complet, Blind Willie McTell, morceau IMMENSE issu des sessions de l'album Infidels de 1983 (un excellent album au passage, bien que pas parfait), qui fut incompréhensiblement mis de côté, sans doute remplacé au final par Union Sundown ou Neighborhood Bully qui lui sont infiniment inférieures. Un des plus grands morceaux de l'entier répertoire (et on sait à quel point il est imposant et loin d'être négligeable) du Barde, un morceau enivrant, hypnotique, définitif, parfait, qui scotche aux enceintes de sa chaîne hi-fi durant 6 minutes. Comment Dylan a-t-il pu mettre de côté ce morceau qui, s'il avait été sur Infidels, en aurait été le sommet (devant I And I et Jokerman) ? Nobody can sing the blues like Blind Willie McTell. Et personne ne chante la folk comme Bob Dylan, semble nous dire ce triple volume imposant (un gros boîtier fat boy avec livret bien généreux) qui montre les différentes facettes, périodes (folk acoustique contestataire, virage poétique beat, virage électrique, retour au folk, passage country, puis la folk-rock, la période chrétienne, le retour aux sources...) de cet artiste incomparable. Essentiel absolu, qu'on soit fan ou pas.
CD 1
Hard Times In New York Town
He Was A Friend Of Mine
Man On The Street
No More Aunction Block
House Carpenter
Talkin' Bear Mountain Picnic Massacre Blues
Let Me Die In My Footsteps
Rambling, Gambling Willie
Talkin' Hava Negellah Blues
Quit Your Low Down Ways
Worried Blues
Kingsport Town
Walkin' Down The Line
Walls Of Red Wing
Paths Of Victory
Talkin' John Birch Paranoid Blues
Who Killed Davey Moore ?
Only A Hobo
Moonshiner
When The Ship Comes In
The Times They Are A-Changin'
Lasts Thoughts On Woody Guthrie
CD 2
Seven Curses
Eternal Circle
Suze (The Cough Song)
Mama, You Been On My Mind
Farewell, Angelina
Subterranean Homesick Blues
If You Gotta Go, Go Now (Or Else You Got To Stay All Night)
Sitting On A Barbed Wire Fence
Like A Rolling Stone
It Takes A Lot To Laugh, It Takes A Train To Cry
I'll Keep It With Mine
She's Your Lover Now
I Shall Be Released
Santa-Fe
If Not For You
Wallflower
Nobody 'Cept You
Tangled Up In Blue
Call Letter Blues
Idiot Wind
CD 3
If You See Her, Say Hello
Golden Loom
Catfish
Seven Days
Ye Shall Be Changed
Every Grain Of Sand
You Changed My Life
Need A Woman
Angelina
Someone's Gotten Hold Of My Heart
Tell Me
Lord Protect My Child
Foot Of Pride
Blind Willie McTell
When The Night Comes Falling From The Sky
Series Of Dreams
Pour "Talking John Birch Paranoid Blues", je crois plutôt que c'est son manager Albert Grossman qui aurait dénié à Dylan le droit de l'inclure sur un de ses disques, vu que le sujet était sensible. Autrement, coffret hautement recommandé qu'on soit fan de Dylan ou pas.