Et voici venu le temps non pas des rires et des chants, mais de parler du deuxième et dernier album de la collaboration courte mais impressionnante entre Brian Eno, légendaire et génial non-musicien britannique, et les Allemands de Cluster. Après un Cluster & Eno déjà remarquable, très relaxant et somme toute plutôt accessible en 1977, la collaboration se poursuit, avec l'aide de Conny Plank (ancien membre de Cluster, et leur coproducteur, c'est dans son studio que fut fait l'album et le précédent), en 1978, sous une autre appellation : Eno Moebius Roedelius. Qu'on ne se trompe pas, malgré l'appellation différente (et qui, cette fois-ci, par un simple orre alphabétique respecté, met Eno en premier), il s'agit bien de Cluster & Eno. La pochette de ce deuxième album, qui s'appelle After The Heat et possède donc, lui, un vrai titre, la pochette est similaire à celle du précédent : une immensité de nature, sans rien d'autre que le paysage. Long de 40 minutes, l'album contient 10 titres qui, à une exception (Luftschloss), possèdent des titres en anglais (contrairement à Cluster & Eno, dont tous les titres, sauf un, étaient écrits en allemand).
Verso de pochette : cette photo est aussi sur la pochette intérieure de la réédition vinyle du premier album de la collaboration entre Eno et Cluster (et peut-être aussi sur la sous-pochette vinyle d'époque, mais je ne peux le confirmer)
Autant le précédent opus était entièrement instrumental, autant celui-ci contient trois morceaux chantés, les trois derniers, tous par Eno et sa voix atone. Holger Czukay, bassiste de Can, joue de la basse sur le dernier morceau, Tzima N'Arki, lequel possède une poste vocale inversée issue du King's Lead Hat qu'Eno avait enregistré en 1977 sur son Before And After Science. C'est un des trois morceaux chantés, mais sa piste chantée est issue d'un autre morceau, antérieur, et est passée à l'envers, donc j'ai limite envie de dire que l'album ne contient en fait que deux morceaux vraiment chantés ! Je peux commencer par parler de ces morceaux chantés (sans revenir sur celui dont je viens de parler, Tzima N'Arki, lequel est remarquable et étrange), à savoir Broken Head et The Bell Dog. Si j'ai toujours un peu de mal à me remémorer The Bell Dog (malgré que ce morceu soit aussi remarquable que les 9 autres de l'album), ce n'est franchement pas le cas du très martial, sombre et limite angoissant Broken Head, sur lequel l'intervention vocale d'Eno se fait tardive. La mélodie est répétitive et glaciale, et quand surgit la voix atone et froide du non-musicien, l'effet est total. Dans le même registre sombre et un peu glauque, sur l'album (mais, cette fois-ci, uniquement instrumental !), on a aussi le premier morceau de la face B, Base & Apex, un des meilleurs de la collaboration Cluster/Eno (les deux albums réunis).
On notera que comme pour le Before And After Science d'Eno, les deux faces sont de durées assez distinctes, inégales. L'album dure 40 minutes, et la face A ne dure que 17 minutes (contre 22/23 minutes pour la B), même chose que pour l'album précité d'Eno, au passage ! En revanche, pas de face 'rock' et de face 'ambient', tout est de l'ambient ici. Oil, Foreign Affairs et Luftschloss sont une triplette introductive remarquable pour After The Heat, tandis que les courts (3 minutes) The Shade et Old Land nécessitent, malgré leur durée, plus d'écoutes pour s'affirmer. Dans l'ensemble, c'est tout de même la seconde face, rien que pour Base & Apex, Broken Head et Tzima N'Arki, que je préfère. Mais After The Heat est une suite imparable de morceaux d'ambiance, et un successeur totalement digne d'intérêt à Cluster & Eno pour moi ; je le pense même un peu plus réussi que le déjà absolument remarquable album de 1977, pour tout dire, et si vous aimez Eno et la musique ambient/expérimentale, si vous avez les oreilles curieuses et que vous ne connaissez pas encore ce disque (ces disques !), alors je ne peux que vous le conseiller (les conseiller !) ardemment.
FACE A
Oil
Foreign Affairs
Luftschloss
The Shade
Old Land
FACE B
Base & Apex
Light Arms
Broken Head
The Bell Dog
Tzima N'Arki
