Attention, car voici que déboule un authentique chef d'oeuvre. Le troisième album de Marillion, fameux groupe de rock progressif anglais fondé au début des années 80. Comme je l'ai déjà dit ici, assez récemment, le long de deux chroniques d'albums du groupe (les premières sur le blog, concernant Marillion), Fugazi et Marbles, je ne suis pas un fan de Marillion, et je n'en serai probablement jamais un. Mais je reconnais une totale évidence : il y à, chez ce groupe, des albums qui me trouent le cul. Brave (que j'aborderai ici un de ces jours, dans pas très longtemps) en fait partie, les deux autres que je viens de citer aussi, et celui qui me tue le plus, celui qui, vraiment, mérite le titre de sommet de Marillion (même si Brave mérite aussi ce titre, les deux albums étant très différents l'un de l'autre : ce sont les sommets des deux périodes du groupe, en gros), c'est ce disque, leur troisième, sorti en 1985, et faisant suite à Fugazi. Cet album s'appelle Misplaced Childhood et il n'est pas rare de le retrouver en bonne place dans les classements du style 'meilleurs albums de rock progressif', ou 'meilleurs albums des années 80', ou meilleurs albums de ces 30 dernières années' (justement, 2015 est l'année des 30 ans de ce disque).
Constitué alors de Fish (chant), Steve Rothery (guitare), Pete Trewavas (basse), Ian Mosley (batterie) et Mark Kelly (claviers), Marillion, dont le nom vient sûrement du Silmarillion de Tolkien, est ici au sommet de son art. Album conceptuel d'une quarantaine de minutes pour 10 titres, Misplaced Childhood aurait été, selon Fish (qui quittera le groupe en 1989), chanteur au timbre très petergabrielien, été inspiré par un long trip de LSD qu'il aurait fait, et qui aurait duré une dizaine d'heures. Le même Fish, en concert (sur un live de Marillion, The Thieving Magpie, on a l'intégralité, dans l'ordre, de l'album ! Enfin, pour la version CD, car le vinyle n'en proposait que la première partie) disait de l'album qu'il ne comprenait que deux chansons, une par face, au lieu des 10 chansons créditées, mais le plus simple serait en fait de dire que Misplaced Childhood (enregistré à Berlin, aux Hansa Tonstudios) n'est qu'un seul et long titre de 41 minutes découpé en plusieurs parties. Les morceaux s'enchaînent sans aucune pause (sauf entre les cinquième et sixième morceaux, rapport au changement de face) et l'album, au même titre que le The Dark Side Of The Moon de Pink Floyd, passe super vite à l'écoute. La première fois que je l'ai écouté, j'ai été surpris quand le CD s'est arrêté après White Feather (le dernier morceau), me disant non ?!, c'est pas possible, déjà fini ?, je n'y croyais pas. Le disque, alternance de chansons calmes et mouvementées, de morceaux courts entrecoupés de longues pièces (Bitter Suite dure 8 minutes, Blind Curve en dure 9,25), comprenant quelques unes des chansons les plus connues du groupe (Kayleigh, pure splendeur inoubliable ; Heart Of Lothian ; Pseudo Silk Kimono ; Waterhole (Expresso Bongo) ; Lavender), est une perfection formelle, servie qui plus est par une des plus belles pochettes du groupe, et même du rock progressif.
Cet album conceptuel, dont je n'ai pas encore vraiment saisi toutes les subtilités (je ne me suis pas encore vraiment penché sur les paroles : à chaque fois que je mets l'album, je suis happé par la musique, durant 41 minutes, ne pouvant rien faire d'autre qu'écouter, quasi religieusement, ce disque), est indéniablement un des albums majeurs des annés 80, et le meilleur album de Marillion avec Fish au chant. La seconde période du groupe, qui démarre en 1989, est l'ère Steve Hogarth, ce chanteur (qui est toujours au sein de Marillion à l'heure actuelle) est lui aussi très bon, dans un registre totalement différent, très rock, et de cette période, Brave (1994) est absolument irremplaçable. Mais de la première période de Marillion, considérée par beaucoup de fans comme la meilleure, ce disque de 1985 est bel et bien l'authentique et inaltérable sommet. L'album suivant, Clutching At Straws (1987), sera lui aussi très réussi (Incommunicado, gros classique), mais rien de comparable avec cette Enfance Déplacée absolument tétanisante de maîtrise.
FACE A
Pseudo Silk Kimono
Kayleigh
Lavender
Bitter Suite :
a) Brief Encounter
b) Lost Weekend
c) Blue Angel
d) Misplaced Rendezvous
e) Windswept Thumb
Heart Of Lothian :
a) Wide Boy
b) Curtain Call
FACE B
Waterhole (Expresso Bongo)
Lord Of The Backstage
Blind Curve :
a) Vocal Under A Bloodlight
b) Passing Strangers
c) Mylo
d) Perimeter Walk
e) Threshold
Childhood's End ?
White Feather