Après un premier opus éponyme tout ce qu'il y à de recommandable et de calibré (du rock progressif du début des 70's comme on aime, dans le genre du Genesis de la même époque), Gentle Giant, pour son deuxième album, a décidé de frapper fort. Acquiring The Taste ('acquérir le goût'), ce deuxième album, sorti en 1971, fait fort rien qu'avec sa pochette, d'un goût plus que déplorable, car à première vue, avant de déplier la pochette (de même que pour le premier opus, cette pochette est en format portrait, aussi bien en vinyle qu'en CD, quand la pochette est rangée, le visuel est donc incliné vers la droite, vous suivez, les gars ?), on croirait vraiment que ce visuel atroce représente une langue en train de lécher un trou de balle. Il n'en est rien, je vous rassure, qui, surtout à l'époque, aurait eu l'idée de faire une pochette pareille ? D'ailleurs, le Gentil Géant n'a pas été censuré, car, en dépliant la pochette, on se rend compte que ce que cette langue humide de salive lèche n'est pas un cul, mais une pêche. Ce qui ne change rien à l'allusion sexuelle, mais au moins, c'est quand même, visuellement parlant, un peu plus sage. Faisant partie des pires pochettes de tous les temps, celle de ce deuxième opus du groupe ne donne franchement pas envie de s'y attarder, sur ce deuxième album, et je n'ai d'ailleurs découvert l'album que bien après le premier opus et Octopus (1973, le meilleur du groupe, que j'aborderai ici prochainement).
A l'intérieur de la pochette ouvrante, une photo noir & blanc du groupe (dont les frangins Shulman, au nombre de trois), la liste des morceaux (il y en à 8, pour 39 minutes), les crédits de production (Tony Visconti, encore lui, aux manettes) et d'enregistrement (AIR Studios, Londres), et surtout, un texte signé du groupe, et dans lequel les Gentils Géants annoncent la couleur : avec ce deuxième album, le groupe a pris le risque de devenir, à terme, impopulaires, leur but étant d'aller, ici, jusqu'au bout de leurs limites musicales et expérimentales, de dépasser les frontières de la musique pop contemporaine, de faire autre chose. Loin des prétentions pécuniaires et commerciales de leurs collègues des autres groupes, les Gentle Giant, eux, veulent aller de l'avant, se faire connaître pour leurs prises de risques musicales, et ne demandent qu'une chose à leur auditoire : s'asseoir pendant l'écoute de l'album, et essayer d'acquérir le goût de leur musique, d'où le titre de l'album (mais ça n'excuse évidemment pas une telle pochette). C'est un fait, le deuxième opus du groupe est très recherché, expérimental, très free, et franchement pas accessible.
Est-ce un bon album, un mauvais ? C'est difficile de répondre à la question? Je sais juste que je n'ai pas particulièrement apprécié l'écoute de ce disque vraiment difficile d'accès, malgré de bons moments comme Pantagruel's Nativity (inspiré par Rabelais, le groupe récidivera dans l'inspiration rabelaisienne avec The Advent Of Panurge sur Octopus ; quoi de plus normal que de faire des chansons inspirées par Rabelais et ses héros géants quand on s'appelle Gentle Giant ?), Plain Truth (qui sera quasiment le seul titre de l'album que le groupe jouera live de temps en temps, pour vous dire) ou The House, The Street, The Room. Mais j'ai trouvé le disque assez prétentieux (le texte de la pochette intérieure l'est, en tout cas), et trop complexe, même pour du rock progressif. A la rigueur, Van Der Graaf Generator ou King Crimson, eux, avaient l'habitude de faire des albums parfois très complexes, mais ils avaient quand même une recherche mélodique assez poussée, et bien que difficiles d'accès, leurs albums restaient, quand même, écoutables, et même plus que ça. Ce disque de Gentle Giant va trop loin pour ce qu'il est, les morceaux ne suivent pas vraiment, on sent même que le groupe n'est pas à l'aise avec la complexité musicale, et d'ailleurs, dès le troisième opus (Three Friends), ils reviendront à un style bien plus calme et populaire ; on peut donc considérer ce disque comme une erreur de parcours, et ce, malgré qu'il soit parfois considéré comme un des meilleurs opus de la bande. Pas pour moi, en tout cas !
FACE A
Pantagruel's Nativity
Edge Of Twilight
The House, The Street, The Room
Acquiring The Taste
FACE B
Wreck
The Moon Is Down
Black Cat
Plain Truth