Il y à des retours qu'on attend avec impatience, qu'on espère tous avec tous les doigts croisés, comme ceux de Bowie, Black Sabbath ou Pink Floyd (trois retours gagnants, d'ailleurs). Il y en à d'autres dont on n'attend au final pas grand chose avant écoute, mais qui parviennent à nous surprendre. Incontestablement, ce dernier album de Toto, sorti il y à quelques semaines, est de ceux-là. Baptisé Toto XIV car il s'agit tout connement de leur quatorzième album studio (il faut, pour cela, inclure l'album Toto XX qui, sorti en 1998, était constitué de chutes de studio inédites, et que certains fans ne considèrent pas toujours comme un disque studio du groupe, plus comme une compilation ; son titre venait du fait qu'il était sorti pour célébrer les 20 ans du groupe), ce disque, tout comme pas mal d'autres du groupe (le premier éponyme, Hydra, Toto IV, The Seventh One, la compilation Past To Present...et Toto XX, aussi), possède un artwork avec une épée dessus. L'épée est en quelque sorte le logo du groupe, son symbole, et un des membres du groupe dira même, un jour, qu'au final, leurs meilleurs albums étaient ceux avec une épée dessus (ce qui n'est pas totalement vrai, et est réducteur : Toto IV, avec une épée dessus, est très inégal ; Isolation, sans épée dessus, est un de leurs meilleurs selon moi, idem pour Kingdom Of Desire qui, lui aussi, n'en possède pas dans son artwork). Le titre de ce nouvel album est donc là pour rappeler qu'il s'agit de leur quatorzième, ce qui force toujours un peu le respect. Il est aussi là (rapport à la manière dont le titre est écrit) pour faire une allusion au plus gros succès commercial du groupe, Toto IV et son enculade de tubes, Africa, Rosanna, I Won't Hold You Back, Waiting For Your Love.
Comme pour encore plus rappeler les bons moments de l'ancien temps, le bassiste originel du groupe, David Hungate, qui était parti en 1982 après Toto IV, est de retour, de même que le claviériste Steve Porcaro (qui était un des membres fondateurs du groupe avec son frangin Jeff, batteur, mort en 1992) et le chanteur Joseph (fils de John) Williams (1986/1988, revenu en 2014 pour le concert des 35 ans du groupe). En revanche, exit Simon Phillips, batteur qui faisait partie du groupe depuis 1992 (suite au décès de Jeff Porcaro), il est remplacé ici par Keith Carlock. Le reste du groupe est inchangé depuis le début : Steve Lukather à la guitare et au chant, David Paich aux claviers et au chant. On notera que si Hungate est de retour, il ne joue pas sur tous les morceaux (sur 4 des 11 seulement), partageant la basse, ici, avec notammnt Leland Sklar (qui joue sur un titre), Tal Wilkenfield (deux titres) et Tim Lefebvre (un titre). Et Lukather en joue sur trois. Pourquoi ce problème de basse ? Le décès, l'an dernier, du bassiste du groupe depuis 1983, Mike Porcaro (frangin de Steve et Jeff), bien entendu, et bien malheureusement... On note la participation de Michael McDonald (fameux choriste et membre des Doobie Brothers de 1976 à 1980) aux choeurs, du saxophoniste Tom Scott et du percussionniste (et fidèle de Toto) Lenny Castro. Bon, assez parlé des musiciens (qui assurent tous ici : les claviers de Paich et Porcaro n'ont que rarement aussi bien sonné sur un album de Toto qu'ici), parlons de la musique. 56 minutes pour ce Toto XIV, et qu'y a-t-il à retenir de ces 11 morceaux ?
Beaucoup de bonnes choses. Si l'album n'est pas parfait, il offre une ribambelle de chansons absolument dantesques. Personnellement, c'est en entendant 21st Century Blues (une des chansons interprétées par Steve Lukather, et un des titres les plus rock et efficaces de l'album) en magasin, en fond sonore, que je me suis définitivement convaincu du bien-fondé de l'achat de cet album, alors que j'hésitais franchement pas mal (des critiques positives sur le Net me convainquaient... le fait que Toto n'avait rien fait de potable en studio depuis 1995 me refroidissait...). Cette chanson, la quatrième de l'album, et une des plus longues (6 minutes ; la plus longue dure presque 7 minutes, Great Expectations, une tuerie mélodique riche en tout, digne de chansons telles que Kingdom Of Desire ou Home Of The Brave), est une pure merveille. Mais les 6 premières chansons sont toutes de pures merveilles, comment ne pas tripper sur Burn, sur Orphan, sur Running Out Of Time ? Unknown Soldier (For Jeffrey) est un bel hommage, très tardif mais sincère, à leur premier batteur, Jeff Porcaro, mort en 1992. Les chansons qui suivent sont parfois un peu moins percutantes (The Little Things, All The Tears Are The Same), mais Chinatown, Fortune et Great Expectations assurent pas mal, voire énormément (les deux dernières, un final dantesque). A l'arrivée, sous sa pochette quelque peu Blade Runner/cyberpunk, Toto XIV est une belle réussite, pas le sommet du groupe, mais clairement le meilleur depuis plus de 20 ans, le meilleur depuis Kingdom Of Desire (1992), certains diraient même depuis 1988 et The Seventh One, et en effet, pourquoi pas ? Un album très rock, parfois à la limite du hard-rock (d'où le tag hard-FM), en tout cas, pas aussi popisant que certains albums de Toto, type Toto IV ou Fahrenheit. Un album remarquable et, disons-le, inespéré, miraculeux. Pas de clip, en revanche, je n'ai pas pu en mettre (bug ?)...
Running Out Of Time
Burn
Holy War
21st Century Blues
Orphan
Unknown Soldier (For Jeffrey)
The Little Things
Chinatown
All The Tears Are The Same
Fortune
Great Expectations