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Les Archive Series de Neil Young, c'est quand même quelque chose. Des albums live que le Loner distille de temps à autre (le dernier en date propose des extraits d'un concert donné au Cellar Door de Washington en 1970, et c'est sublime, comme toujours), issus de sa réserve personnelle, des cuvées juteuses qu'il a mis en bouteille lui-même dans son château... Pour le moment, si on excepte un live enregistré en 1992 (Dreamin' Man) issu de la tournée de l'album Harvest Moon, et proposant exactement l'intégralité, dans le désordre, dudit album, tous les Archive Series ne s'intéressent qu'à une seule époque : 1968/1971. Certains diront la meilleure période de Neil Young, et tout en disant qu'ils n'ont pas tort, il faut quand même insister lourdement, au risque de faire du mal à quelqu'un par mégarde, que la période 1973/1977 est elle aussi démentielle, et que le début des années 90 (1990/1995) vaut le coup d'oreille également. Enfin bref. Et puis, après tout, ça ne concerne pas cet album, numéroté 2 dans la collection, sorti en 2006, car il propose des extraits d'un concert (de plusieurs, en fait : deux) donné par Neil Young et Crazy Horse au Fillmore East, New York, en 1970. Tout à fait connement, cet album s'intitule donc Live At The Fillmore East 1970. Ce disque remarquablement bien enregistré (le son a sans aucun doute été considérablement nettoyé, car il est impeccable) est malheureusement très court, seulement 43 minutes (pour 6 titres, dont deux qui sont très longs ; les fans du Loner n'ont pas besoin de se demander quels sont les deux longs titres, il suffit de regarder la setlist, Down By The River et Cowgirl In The Sand, dans leurs version studio, tutoyant les 10 minutes chacun, et sur ce live, font respectivement 12 et 16 minutes...). Dans son autobiographie (elle-même ne brillant pas par un titre français incroyablement original : Une Autobiographie), Neil dit qu'à l'époque, quand il jouait un de ces deux longs morceaux en live, il ne jouait pas l'autre ; c'était l'un ou l'autre, invariablement. Par conséquent, les 6 titres ici ne proviennent pas du même concert. Les concerts furent faits en mars 1970, les 6 et 7.

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Tétanisant, voilà ce qu'il faut dire de ce Live At The Fillmore East. Tétanisant, sauf son emballage, un boîtier cartonné double, très mince, fragile, avec une simple feuille de papier avec les crédits dedans (et une belle photo avec articles de presse dans le boîtier). Mais musicalement, tudieu... Accompagné de Jack Nitzsche au piano, Neil Young et son groupe Crazy Horse (Danny Whitten, Billy Talbot, Ralph Molina) livre une performance incroyable. On notera qu'un des titres, Come On Baby Let's Go Downtown, à moitié chanté par Whitten (qui, en 1972, décèdera d'overdose, il venait d'être viré du groupe par Neil, qui était furax contre lui ; Neil entrera en dépression suite à ce décès), se trouvait déjà, dans une version légèrement éditée (une quinzaine de secondes en moins, on va dire), sur l'album Tonight's The Night de 1975 (album studio enregistré en 1973, consécutivement à la mort de Whitten et la dépression dont je viens de parler, mais qui ne sortira qu'en 1975, la maison de disques l'ayant trouvé trop anti-commercial, et il est vrai que c'est un disque mortifère), sa présence sur l'album de 1975 était en guise d'hommage à Whitten. Ici, on le retrouve donc, dans son élément naturel, ce fameux (et très bon) morceau, pas le meilleur du lot (les deux mammouths écrasent tout, et dans les autres titres, Winterlong, morceau jamais placé sur un album studio et que le grand public découvrira en version studio, en 1977, sur la compilation Decade, est remarquable). Everybody Knows This Is Nowhere est une merveille, Wonderin' est excellente...

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Mais ce sont les deux cavalcades Down By The River (un peu plus de 12 minutes) et Cowgirl In The Sand (16 minutes, même si la dernière minute est en fait constituée essentiellement d'applaudissements) qui foutent le feu ici. Occupant plus de la moitié du live, baignées par une production éclatante (le son est juste immense, je crois l'avoir dit, hein ?), ces deux pièces montées, et surtout la seconde, sont de vraies tueries folk-rock, et même rock tout court, Neil Young y brille de mille feux avec sa guitare (Whitten aussi, mais le Loner était le guitariste principal, évidemment). Déjà que les versions studio sont sensationnelles, mais là... Rien que pour Cowgirl In The Sand, ce Live At The Fillmore East 1970 est rigoureusement crucial, indispensable. Si on y rajoute les autres titres, ça donne, au final, rien de moins qu'un des meilleurs lives de Neil Young. Tout simplement.

Everybody Knows This Is Nowhere

Winterlong

Down By The River

Wonderin'

Come On Baby Let's Go Downtown

Cowgirl In The Sand