Orgiaque. Le mot correspond bien à ce que l'on ressent quand on écoute ce quatrième (et pour le moment, dernier, vu qu'il est sorti le 28 octobre dernier) album des Canadiens Arcade Fire. Cet album porte le nom de Reflektor, et est double. Précisons d'ailleurs que sa durée n'est pas excessive en dépit de ses deux disques, car le premier CD dure 36 minutes (pour 7 morceaux) et le second, 39 (pour 6 morceaux). Autrement dit, même en rajoutant les secondes (les disques ne font pas précisément 36 et 39 minutes), on peut, je pense, tout placer sur un seul CD, c'est un faux double album (pour le vinyle, la question ne se pose pas). C'est vraisemblablement pour en rajouter à l'aspect pharaonique de l'album et pour accentuer le côté album conceptuel en deux parties qu'Arcade Fire a sorti le disque en double CD. Bon, le disque n'étant pas commercialisé à un prix immensément élevé (17 balles, pour deux CDs, ça va), du moins pour le moment, je ne gueule pas trop... Surtout que Reflektor est un disque de malade. Un chef d'oeuvre absolu, qui renvoie les précédents opus du groupe de Win Butler et Régine Chassagne aux pâquerettes. Et pourtant, ces précédents albums, pardon ! Funeral (2004) est un des meilleurs premiers albums au monde ; Neon Bible (2007) est une confirmation éblouissante, même s'il reste le moins grandiose des albums du groupe ; The Suburbs (2010) est une tuerie absolue, grandiose, un sommet. Le groupe met trois ans entre chaque livraison, c'est donc tout à fait logiquement que Reflektor pointe le bout de son nez en 2013, trois ans après le précédent.
Autant être franc : assez porté sur les sonorités pop et 80's, cet album conceptuel (je n'ai pas encore totalement saisi le concept, ayant passé les deux premières écoutes de l'album - en deux jours, une écoute par jour ! - à me concentrer sur la musique, les mélodies, le chant) sorti sous une pochette antique et semblant apparemment se baser en partie sur la légende d'Orphée et Eurydice, cet album, donc, est une totale réussite qui rend vraiment faiblards les autres albums du groupe. On peut même aisément, alors qu'on s'approche à grands pas de la fin de l'année, dire que Reflektor est, devant The Next Day de Bowie, ...Like Clockwork des Queens Of The Stone Age, New de McCartney et Cabinet Of Curiosities de Jacco Gardner, l'album de l'année. Que dire ? Lancé il y à quelques semaines par un single promotionnel (la chanson-titre, plus de 7 minutes de tuerie), Reflektor est une claque musicale. Impossible de me sortir de la tête ces 13 chansons, dont certaines offrent des gimmicks géniaux (la basse de We Exist, les claviers de Porno, pour ne citer que ces deux exemples), des mélodies imparables (Joan Of Arc, Here Comes The Night Time et sa reprise plus douce en ouverture du second disque ; It's Never Over (Hey Orpheus) ; Afterlife), une ambiance de folie (Reflektor). A aucun moment l'ennui ne vient montrer sa sale gueule, tout au plus peut-on dire que le dernier titre, Supersymmetry (11 minutes et 16 secondes, le plus long morceau de l'album, de loin) se finit un peu étrangement ; les trois-quatre dernières minutes, instrumentales, sont space, mais elles permettent, tout comme les dix secondes de silence à la fin de Joan Of Arc qui achève le CD 1, de faire un peu le vide, de se remettre de son écoute.
Le chant, partagé entre Win Butler et sa compagne Régine (qui, parfois, chante en français), est totalement maîtrisé. Je n'irai pas jusqu'à dire que Butler chante de mieux en mieux, vu qu'il chantait déjà super bien avant, mais, en tout cas, il ne chante pas moins bien. Musicalement, Reflektor est une bombe sensorielle, émotionnelle, une sorte de The Suburbs puissance un zillion. A ce niveau, on atteint la perfection, difficile de se dire qu'Arcade Fire possède encore une marge de progression ; s'il y en à une, elle est infime, et le prochain album (rendez-vous en 2016 ?) aura du mal à être encore meilleur. Pour finir, vous l'aurez compris, cet album est une pure splendeur, un album certes long (le plus long du groupe), mais parfait. A noter, pour finir (et vraiment pour finir, cette fois, ah ah ah !) que le fait que l'album soit double en CD malgré qu'il ne dure que 76 minutes pourrait aussi s'expliquer par le fait qu'apparemment, un morceau bonus caché d'une dizaine de minutes se situerait en pregap (c'est à dire, en piste cachée avant la première plage audio du premier disque), écoutable pour ceux ayant la possibilité de faire la fonction 'retour rapide' sur leur chaîne hi-fi, au moment où démarre le premier morceau. Ce qui, en fait, ferait que le premier CD durerait 46 minutes au lieu de 36, et, vu comme ça, oui, en rajoutant les 39 minutes de l'autre disque, c'est trop long pour un seul CD (86 minutes) !
CD 1
Reflektor
We Exist
Flashbulb Eyes
Here Comes The Night Time 1
Normal Person
You Already Know
Joan Of Arc
CD 2
Here Comes The Night Time 2
Awful Sound (Oh Eurydice)
It's Never Over (Hey Orpheus)
Porno
Afterlife
Supersymmetry
Oui, un album très 80's et exotique (pas mal de sonorités caraibes), un peu leur exercice de style Talking Heads.
J'exprime un léger doute quant à sa tenue sur la durée.
Et deux ou trois titres n'étaient peut-être pas indispensables... (pas fan de We Exist, par exemple)
Mais quand on sait balancer des trucs comme le morceai-titre, Joan Of Arc, Here Comes The Night Time ou Afterlife, on peut bien se permettre des petites baisses de régime.
L'échec n'est pas encore de mise, bravo messieurs dames.