Après un premier album qui s'est très mal vendu (quelques années plus tard, dans un entrepôt de New York, des milliers d'exemplaires de l'album seront retrouvés, et expédiés en Australie, où, contre toute attente, le succès fut, à l'époque, grand), Rodriguez a eu l'idée d'en faire un deuxième. La maison de disques l'ayant signé, Sussex Records, n'avait apparemment rien à redire au fait qu'un artiste certes incroyablement talentueux mais totalement poissard décide de leur faire dépenser encore un peu d'argent pour un deuxième album. Bref. On ne va pas s'en plaindre, hein ? Cold Fact, sorti en 1970, fut donc un bide. Mais quel album, sinon (en dépit d'une pochette vraiment peu réussie et qui ne donne pas envie de se pencher sur le disque qu'elle contient...), un album de folk-rock engagé, rempli de chansons aussi efficaces que I Wonder, Crucify Your Mind, The Establishment Blues... Un an plus tard, en 1971 donc, Rodriguez publie son deuxième album. Son dernier, aussi (oh, il sortira bien, en 1977, en Australie uniquement, une compilation renfermant des chansons des deux albums plus trois inédits que l'on retrouvera en bonus-tracks sur la réédition CD du deuxième opus, At His Best, mais plus aucun album studio). Enregistré en 1970, produit par Steve Rowland, enregistré avec notamment Chris Spedding à la guitare, ce deuxième album s'appelle Coming From Reality et il dure 40 minutes, un album bien plus généreux que le précédents, qui atteignait avec peine une grosse demi-heure.
Apparemment, le vinyle original, et au moins une des rééditions (que je ne possède pas, n'ayant pas eu la jugeote de l'acheter quand je l'ai vue en magasin, vu son prix rédhibitoire) est en découpage, avec Rodriguez, sur la photo, en die-cut par rapport au fond (voir la photo, qui est plus parlante que cette explication merdique de ma part). Je le possède en vinyle, réédité, mais une réédition basique, sans découpage. Plaignez-moi. Bon, sinon, cette pochette est bien plus réussie que celle du précédent opus, n'est-ce pas ? Une simple photo de Rodriguez, assis, confiant (sans doute pensait-il que cet album se vendrait, lui, convenablement...dans le cul, Sixto !), sur un escalier devant une maison en bois, et derrière lui, un mural à son effigie. Et une autre photo de lui, dans un cadre blanc, photo cachée par celle de la pochette ouvrante en découpage, donc. Coming From Reality est plus riche que Cold Fact, plus produit, plus rock aussi, tout en étant, tout de même, un disque de folk-rock engagé. Mais il est plus chatoyant (que dire face à l'irréelle beauté de Sandrevan Lullaby - Lifestyles, long de presque 7 minutes, magnifiquement arrangé, qui ouvre la seconde face ?). On a des cordes en pagaille (il y en avait aussi sur le précédent opus, mais quand même, un peu moins), sur le final Cause, ou bien sur It Started Out So Nice.
Après, l'album s'ouvre sur Climb Up On My Music, et sa guitare bien rock et trippante, et Heikki's Suburban Bus Tour offre aussi une atmosphère assez rock et presque, en fait, pop. Les thèmes sont globalement les mêmes (les paroles sont encore une fois proposées, sur la sous-pochette cette fois-ci), la vie dans les grandes villes, la violence, le sexe, l'oppression, mais aussi l'amour (I Think Of You). Encore une fois, les chansons, 10 ici au total, sont toutes de pures merveilles, entre A Most Disgusting Song, Halfway Up The Stairs, To Whom It May Concern ou Silver Words ?, difficile de faire un choix, et en tout cas, je n'en vois aucune ne moins bonne que le reste (juste Sandrevan Lullaby - Lifestyles en tant que sommet de l'entier catalogue de Rodriguez). Encore une fois, qu'un album aussi prodigieux se soit vendu aussi mal à l'époque fait mal, très mal, même si cette lamentable erreur sera au final réparée, même si tardivement, par le biais de ces deux rééditions (2008 et 2009) des albums, d'un film documentaire sur le bonhomme en 2012, et bien entendu, avant tout ça, par un succès étonnant mais bien venu en Australie quelques années après la sortie initiale de ces deux monstres sacrés de la folk engagée de l'époque. C'est juste fantastique et totalement indispensable.
FACE A
Climb Up On My Music
A Most Disgusting Song
I Think Of You
Heikki's Suburban Bus Tour
Silver Words ?
FACE B
Sandrevan Lullaby - Lifestyles
To Whom It May Concern
It Started Out So Nice
Halfway Up The Stairs
Cause
Tu n'as pas parlé des bonus tracks présents dans la réédition: mention spéciale à la géniale "Can't Get Away" qui aurait pu faire un véritable tube.