En voici, un disque de bizarre ! De même que l'artiste l'ayant sorti. Il s'agit de Laurie Anderson, une artiste au sens strict du terme (diplômée en histoire de l'art et en sculpture, elle a réalisé des performances dans des salles de spectacles...), une avant-gardiste bien plus connue, à l'heure actuelle, pour être, depuis 2008, madame Lou Reed que pour ses albums. En 1982, elle sort son premier album, un disque assez culte, Big Science. Ce disque donc. Big Science est un album qui, en 38 minutes (et 9 titres ; sur le vinyle, les deux derniers sont mis ensemble, ce qui fait 8 titres en tout sur le vinyle), offre de la musique totalement expérimentale, free, avant-gardiste, tout en étant, aussi, un petit peu pop. Mais c'est vraiment un peu ! Laurie Anderson chante (ou plutôt, généralement, déclame, en spoken-word, ses textes) et joue de divers claviers (orgue farfisa, vocoder, piano), plus du violon, des percussions, marimba. Elle est entouré de musiciens franchement talentueux, mais peu connus, comme Roma Baran (basse farfisa, glass-harmonica, accordéon), Perry Hoberman (flûte, saxophone, choeurs), Bill Obrecht (saxophone), Peter Gordon (clarinette, saxophone) et David Van Tieghem (batterie, percussions diverses). Pas de guitare, pas de vraie basse.
Verso de pochette
Minimaliste, sobre, racé et franchement inclassable, Big Science est connu principalement pour un morceau, le long (8,20 minutes ouvrant la face B) O Superman. Ce morceau, dédié à Jules Massenet et inspiré par son opéra Le Cid, est une oeuvre d'art absolue, d'une dinguerie assumée. S'inspirant de la ligne de chant Ô Souverain, ô juge, ô père (de l'opéra de Massenet) pour son introduction (O Superman, O judge, O mom and dad), Laurie Anderson signe ici un morceau difficile à apprécier à la première écoute, mais qui devient par la suite assez marquant, et qui s'écoute respectueusement. Quand je dis que l'album est avant-gardiste, ce n'est pas comme les albums de John & Yoko, hein, ce n'est pas aussi inclassable. Mais c'est certain, si on compare Big Science avec du rock, ce n'est pas la même chose du tout. Le reste de l'album est remarquable aussi, citons From The Air, Let X=X, It Tango (ces deux titres sont réunis sur le vinyle) ou le morceau-titre. Le seul morceau qui ne me plaît pas trop ici est Example #22. Les morceaux sont souvent aussi impénétrables, au premier abord, que leurs titres (Let X=X). Le chant de Laurie est juste incroyable, enfin, sa voix, car elle ne chante pas vraiment.
Au final, ce disque culte n'est pas à conseiller aux amateurs de musique pop sucrée ; c'est un truc à vous faire passer du King Crimson pour du Duran Duran, niveau accessibilité. Mais c'est vraiment une réussite, un disque franchement excellent, rempli d'excellents morceaux, et rien que cet O Superman de folie suffit à rendre Big Science et Laurie Anderson cultes. Vraiment pas facile d'accès, mais une fois qu'on a réussi à l'apprivoiser, quel délice !
FACE A
From The Air
Big Science
Sweaters
Walking & Falling
Born, Never Asked
FACE B
O Superman (For Massenet)
Example #22
Let X=X
It Tango
