Ce disque compte beaucoup pour moi. Je ne sais pas si ça serait le disque que j'embarquerais avec moi sur une île déserte, mais il fait partie des albums que j'aime le plus réécouter actuellement. C'est le premier album de J.J. Cale, il date de 1972, est sorti sous une très charmante pochette dessinée représentant un raton laveur habillé et un chien endormi, et il s'appelle Naturally. C'est un disque court, très court : 12 titres, ce qui est pas mal, mais pour à peine 32 petites minutes, aucun morceau ne dépasse 3,20 minutes (en fait, il n'y à que deux morceaux de 3 minutes et plus, les autres oscillent à 2,30 minutes l'unité) ! C'est un disque d'une sobriété exemplaire, J.J. Cale, immense guitariste de blues américain sous forte influence Clapton (il a avoué avoir eu envie de se lancer dans la musique, lui qui, auparavant, avait testé divers petits boulots, en écoutant Clapton), avec qui il collaborera souvent (Clapton a par ailleurs souvent repris J.J. Cale), signe ici un disque sublime, attachant comme sa pochette, un disque produit par Audie Ashworth et enregistré au studio Bradley's Barn, dans le Tennessee, et au Moss Rose Studio, même Etat, entre septembre 1970 et juin 1971, en plusieurs périodes (pas dans la continuité des mois). J.J. Cale, ici, signe un disque avare en soli de guitare, mais renversant de bout en bout par l'économie de ses moyens. Less is more est clairement le credo de l'album et de son auteur (il signe, entièrement, toutes les chansons)
Verso de pochette, pas repris sur le CD, dommage...
Pourtant, J.J. est entouré, ici : Karl Himmel, Chuck Browning (batterie), Carl Radle, Tim Drummond, Norbert Putnam (basse), Bob Wilson, David Briggs, Jerry Whitehurst (piano, orgue), Ed Colis (harmonica), Weldon Myrick (steel guitar), Walter Haynes (dobro), Mac Gayden (slide guitar), Buddy Spiker, Shorty Lavender (violon), et Diane Davidson aux choeurs sur deux titres (River Runs Deep et Crazy Mama). Evidemment, J.J. Cale chante et tient la guitare. Le son de l'album respire la nature, l'enregistrement fait à la maison (ce qui n'est donc pas le cas), et, autant le dire, est simpliste. Ce n'est pas une production à la Phil Spector ou George Martin ! On peut dire que le son de Naturally a vieilli, en bien et en mal : le disque accuse le poids des années, mais conserve un charme, une patine rétro totalement attachante et charmante (deuxième fois que j'utilise ce terme, qui correspond assez bien à Naturally par ailleurs) ! Bon, sinon, tout du long de ses 32 minutes bien courtes, Naturally offre de vraies merveilles, parfois accompagnées de cuivres du plus bel effet (Call The Doctor). Trois chansons, surtout, sont le haut du panier ici : Magnolia, After Midnight (que Clapton magnifiera en live) et surtout le morceau d'ouverture, Call Me The Breeze, qui sera repris par Lynyrd Skynyrd deux ans plus tard sur Second Helping, et qui a été utilisée, récemment, dans sa version originale de J.J., pour une publicité pour une marque de voitures (je ne me souviens plus laquelle, et je m'en fous un peu) ! Une chanson juste grandiose.
Call Me The Breeze et After Midnight sont sans doute les sommets de l'album, mais Naturally est magnifique de bout en bout. Le timbre de voix très calme (Mark Knopfler possède peu ou prou le même, il s'inspirera d'ailleurs très fortement de l'oeuvre de J.J. Cale pour les premiers albums de Dire Straits) de Cale est reposant, même si certains trouveront l'ensemble monotone, c'est selon les goûts. Call The Doctor, Don't Go To Strangers, Clyde, Crazy Mama, River Runs Deep, Nowhere To Run, Crying Eyes, Bringing It Back, autant de pures merveilles laid-back, bluesy, folkeuses aussi, qui en imposent dès la première écoute. Les musiciens accompagnant J.J. sont pour certains (Briggs, qui sera producteur de Neil Young, Drummond, Radle qui a fait partie des Dominoes de Clapton, Browning, Wilson), connus, et tous sont fantastiques. Le son de l'album est certes un petit peu daté, mais il conserve, donc, un vrai charme, et dans l'ensemble, difficile d'aimer le blues-rock sans aimer Naturally, premier et sans doute meilleur album de J.J. Cale, même si Okie, Really, Grasshopper et l'album fait avec Clapton (The Road To Escondido) sont également à écouter. Bref, sensationnel !!
FACE A
Call Me The Breeze
Call The Doctor
Don't Go To Strangers
Woman I Love
Magnolia
Clyde
FACE B
Crazy Mama
Nowhere To Run
After Midnight
River Runs Deep
Bringing It Back
Crying Eyes