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Je me souviens encore du jour où j'ai découvert, en l'achetant, cet album: j'avais aussi acheté et découvert un autre double album anthologique de 1968, le Double Blanc des Beatles. Parlez d'une journée dorée : découvrir le Double Blanc et Electric Ladyland, d'un coup ! On peut difficilement rêver mieux, non ? Electric Ladyland, double à sa sortie en vinyle, depuis simple CD de 76 minutes, est le troisième album du Jimi Hendrix Experience, groupe de Jimi Hendrix (chant, guitare, compositions), fondé en 1966. C'est un disque majeur, la consécration ultime du guitariste. L'album existe sous deux pochettes. Celle servant à illustrer l'album est celle de la réédition vinyle et de l'édition CD (au dos, la photo du trio, voir plus bas, et à l'intérieur, voir encore plus bas). Mais à la base, l'album est sorti sous une pochette représentant 19 femmes nues, façon Bain Turc d'Ingres, sur fond noir, avec des photos et pochettes d'albums d'Hendrix en main pour certaines. La pochette ne plaira pas à Hendrix, ce n'était pas ce qu'il recherchait, et elle sera, pour des problèmes de censure, rapidement changée. Si vous possédez une édition vinyle avec cette pochette, ne jamais vous en séparer ! Au sujet de la pochette, on peut voir, dans le livret CD, des feuillets scannés, annotés de la main même d'Hendrix, feuillets destinés à l'imprimerie, où il tente de leur expliquer comment il désire voir la pochette de l'album (où placer les photos et le long texte tarabiscoté qu'il a signé, etc). A la base, il pensait mettre, en recto-verso, des photos du groupe avec des enfants, assis près d'une fontaine (photo plus bas) !

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Verso de pochette : de gauche à droite, Redding, Hendrix, Mitchell

 Electric Ladyland est un monstre sacré. Que dire de plus qui n'a déjà été dit, en fait ? Ca faisait longtemps que je n'avais pas réécouté ce disque, et en le réécoutant très dernièrement, je me suis rendu compte que je n'avais, en fait, pas besoin de le réécouter : il est totalement, définitivement, profondément imprimé dans mon cerveau, de la première à la dernière note. Le trio (Hendrix, le bassiste et chanteur occasionnel Noel Redding et le batteur Mitch Mitchell, tous morts désormais, dans l'ordre cité) livre ici un disque du feu de Vulcain. Tout, TOUT, ici, est démentiel, même les courts et expérimentaux (bruitistes, en fait) ...And The Gods Made Love et Moon, Turn The Tides...gently gently away (les minuscules de la fin du titre sont dans le titre), qui, musicalement, mis à part d'introduire l'album (premier morceau cité) et de conclure la face C (second morceau cité), ne servent pas à grand chose, ils ne durent qu'une minute chacun. Même Long Hot Summer Night, morceau le moins percutant de l'ensemble, est une réussite. Après, c'est vrai qu'il y à des monuments, ici, qui atomisent pas mal les morceaux les plus classiques : Crosstown Traffic et son riff de folie furieuse, Come On (Let The Good Times Roll) idem, Gypsy Eyes qui est démoniaque, Burning Of The Midnight Lamp et ses sonorités à moitié hare krishna, à moitié space... On a aussi la reprise démentielle du All Along The Watchtower de Bob Dylan, et House Burning Down...

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Intérieur de pochette vinyle

On a aussi la paire Rainy Day, Dream Away et sa suite Still Raining, Still Dreaming, le premier ouvre la face C, et le second, qui démarre pile poil là où le second se finissait (sur un break hallucinant), ouvre la face D. L'effet voulu, par ce break qui se répête en ouverture de face D, est qu'on a l'impression, une fois Rainy Day, Dream Away fini, qu'on est hors du temps, hors de tout, pendant le quart d'heure (environ) de 1983... (A Merman I Should Turn To Be)/Moon, Turn The Tides...gently gently away, les deux titres occupant le reste de la face C. Une fois la face D lancée, le break interrompu de Rainy Day, Dream Away retentit sur Still Raining, Still Dreaming, et ça fait un peu comme si on revenait brutalement à la réalité après un quart d'heure de folie guitaristique aventureuse. Difficile à décrire, facile à comprendre quand on écoute le disque.

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Pochette vinyle originale qui sera rapidement changée

Au sujet de 1983... (A Merman I Should Turn To Be), c'est juste indescriptible, quasiment 14 minutes de bonheur, Hendrix au sommet de son art, le sommet du second disque d'Electric Ladyland... et le second sommet de l'album derrière les 15 minutes (tout rond !) du quintessentiel, cultissime, dévastateur Voodoo Chile achevant la face A (et trouvant une suite nettement plus courte - 5,20 minutes - en final d'album, Voodoo Child (Slight Return), au moins aussi grandiose qu'All Along The Watchtower qui la précède). Ces deux morceaux, Voodoo Chile (avec Stevie Winwood en invité à l'orgue) et 1983... (A Merman I Should Turn To Be), auraient pu à eux deux faire un disque entier (en rajoutant Voodoo Child (Slight Return) pour augmenter un peu la durée), ça aurait été un disque court, mais ô combien mortel... Enfin, Electric Ladyland est mortel, tel qu'il est, de toute façon, donc ce que je viens de dire est idiot.

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Rien à jeter sur cet album infernal, donc. Si vous ne possédez pas encore un exemplaire d'Electric Ladyland chez vous (perso, j'en ai deux : le CD classique et le CD viny-replica), j'te cause plus. C'est un des albums les plus essentiels, majeurs, monstrueux du rock des années 60 à maintenant, le sommet absolu de Jimi Hendrix, un des albums les plus parfaits que je connaisse... Pas mal de groupes de l'époque ou de maintenant tueraient pour avoir, sur un de leurs albums, des morceaux aussi tétanisants que Voodoo Chile, All Along The Watchtower (reprise encore plus réussie que l'original, et aussi et surtout très différente), 1983... (A Merman I Should Turn To Be) ou Crosstown Traffic. Et les morceaux les plus classiques, Little Miss Strange (chantée par Redding), Long Hot Summer Night, Have You Ever Been (To Electric Ladyland), Rainy Day, Dream Away (morceau très zen), sont également fantastiques. La production (Eddie Kramer, Hendrix) assure, la durée est parfaite, l'interprétation est tuante... Enfin bref, ce disque est un killer, tout simplement.

FACE A

...And The Gods Made Love

Have You Ever Been (To Electric Ladyland)

Crosstown Traffic

Voodoo Chile

FACE B

Little Miss Strange

Long Hot Summer Night

Come On (Let The Good Times Roll)

Gypsy Eyes

Burning Of The Midnight Lamp

FACE C

Rainy Day, Dream Away

1983... (A Merman I Should Turn To Be)

Moon, Turn The Tides...gently gently away

FACE D

Still Raining, Still Dreaming

House Burning Down

All Along The Watchtower

Voodoo Child (Slight Return)