1975 WISH YOU WERE HERE

Pour ce troisième numéro des pochettes de légende, voici une pochette vraiment de légende, comme son contenu (un des sommets absolus de Pink Floyd, sorti en 1975) : Wish You Were Here. Une pochette qui, comme la quasi-totalité des albums du Floyd (ce n'est pas le cas, sauf erreur de ma part, du premier album, The Piper At The Gates Of Dawn, ni de The Final Cut, ni de la compilation Relics, ni de la compilation Works), est signée d'un des plus fameux, si ce n'est le plus fameux des studios de design, j'ai nommé Hipgnosis, dirigé par Storm Thorgeson. Hipgnosis, c'est Led Zeppelin (Houses Of The Holy, Presence), UFO (Force It), le Floyd, donc, ou bien encore Genesis (The Lamb Lies Down On Broadway), T-Rex (Electric Warrior), Pretty Things (Parachute), Scorpions (Lovedrive, Animal Magnetism), Rainbow (Difficult To Cure)... La liste est longue. Le studio est surtout connu pour son boulot avec le Floyd et affiliés (The Madcap Laughs de Syd Barrett), leur première réalisation ayant été la pochette du deuxième opus du groupe, A Saucerful Of Secrets (donc, j'avais bien raison, la pochette du premier Floyd n'est pas d'eux !). Si les pochettes d'Ummagumma (un cadre dans un cadre dans un cadre, personnages intervertis), d'Atom Heart Mother (la vache !) et d'Animals (la centrale électrique de Battersea avec un cochon volant gonflable au-dessus) sont les plus connues, celle de Wish You Were Here est une des plus belles. Et cohérentes.

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Surpochette 

Cohérente, pourquoi ? Parce que si l'album, au niveau des chansons, parle le plus souvent du concept de l'absence (Shine On, You Crazy Diamond et la chanson-titre parlent, en gros, de Syd Barrett, qui rendra visite au groupe en 1974 pendant l'enregistrement, méconnaissable, bouffi, ahuri...), l'artwork, lui, est centré sur un seul et unique thème : les quatre éléments. L'album est sorti en vinyle vendu dans une surpochette de plastique noir ornée d'un autocollant (voir ci-dessus). Pas mal de gens, à l'époque, ont du virer, jeter cette surpochette, n'estimant pas trop sa valeur. elle fait partie intégrante de l'artwork. Pendant de nombreuses années, alors que le groupe refusait de sortir leurs albums en CD, le disque sera commercialisé, en CD, officieusement, avec cette surpochette noire en guise de pochette, ce n'est que lorsque les albums sortirent officiellement, dans le milieu des années 90, que la pochette blanche sera reprise. Cette pochette est ornée de deux photos, et on en trouve aussi deux dans la sous-pochettes proposant les paroles.

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Insert (et dos de pochette)

A noter qu'une carte postale aux bords dentés sera glissée dans la pochette, reprenant la photo de l'insert des paroles (le nageur et le lac). Détaillons un peu ces photos, si vous le voulez bien. Commençons d'abord par celle dont je n'ai pas trouvé de photos sur le Net, et qui ne se trouve que dansle livret CD : un nageur dans le sable, à moitié enfoui. Evidemment, c'est l'élément 'terre'. Tout comme le verso de pochette (depuis réutilisé pour le coffret collector de l'album sorti en novembre dernier), cet homme en costard, sans visage, sans corps, en fait (un costard dans le vide), dans le désert, brandissant un vinyle transparent, à côté d'une valise ornée de stickers floydiens (dont les deux stickers qui étaient glissés dans la pochette de The Dark Side Of The Moon). Pour celui-là, ce visuel remarquable faisant penser à du Magritte des grands jours, voir ci-dessous.

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Verso de pochette

La pochette recto, évidemment, c'est le feu. Deux hommes (dans la réalité, deux cascadeurs de cinéma) qui, dans un décor d'entrepôts, se serrent la main. Ils se ressemblent, l'un d'eux est en feu, mais la photo est dans le style on fait comme si de rien n'était, d'accord ? . La photo fut prise aux studios Warner, à Hollywood, et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elle marque totalement les esprits. A l'intérieur, on a une photo représentant un nageur à moitié immergé dans un lac de montagne, seule la partie inférieure de son corps est hors de l'eau, et l'effet est totalement symétrique entre le haut de la photo et le reflet de l'homme et des montagnes dans le lac. C'est cette photo symbolisant l'élément de l'eau qui, en plus grand (car la photo interne est un petit médaillon situé sur l'insert, au niveau des paroles et crédits de l'album), orne la carte postale glissée dans la pochette, voir plus bas. De l'autre côté de l'insert, une photo prend toute la place, un foulard rouge planant dans l'air (on reconnaît donc de quel élément il s'agit, l'air). On notera que quel que soit l'élément représenté sur ces photos marquantes et splendides, il y à un détail qui en rajoute : de la terre semble couler du bord du cadre, au verso de pochette ; la photo du recto prend feu sur le côté ; la photo de l'air semble tordue, comme si elle flottait aussi ; la photo de l'eau semble déborder de liquide.

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Carte postale glissée dans la pochette

Pochette à fond dans le trip, donc, que celle de Wish You Were Here. Assurément, c'est une des pochettes qui marque le plus les esprits. Ces visions accompagnent l'auditeur durant toute l'écoute ; les nappes de synthés au début de l'album font penser à des flammes qui dansent, ou à de l'air qui passe dans des canalisations. Ces visions de ces deux hommes, symétriques malgré l'un des deux qui flambe, ou de ce nageur dans le lac (symétrique aussi), ou de ce foulard dans l'air, encerclé par deux rangées d'arbres symétriques, de cet homme étrange et sans visage dans le désert, ou de ce nageur enfoui dans le sable, ou de cette poignée de main robotique encerclée des quatre éléments sur la surpochette noire, toutes ces visions restent longtemps en mémoire, deviennent indissociables de l'album. Font partie du trip. Quand on me dit Wish You Were Here, je pense à cet homme en flammes, à ce foulard rouge. Il me suffit de passer devant une étendue de grands arbres pour me dire qu'il ne manque plus qu'un foulard rouge et l'illusion sera parfaite. Si je passe dans une zone industrielle, la vision d'une allée d'entrepôts me fait penser à la pochette. Autant de choses qui, je le sais, sont connes, mais je n'y peux rien : Wish You Were Here, depuis ma plus tendre enfance quand j'ai découvert le disque grâce à un vinyle que j'ai toujours, m'a marqué au fer rouge et continue de le faire ! Une pochette à la hauteur du disque qu'elle renferme. Hipgnosis en grande forme.