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Encore un peu de rock français ? Là, on va parler de quelque chose d'absolument tuant : le seul et unique album des Frenchies. Avec un nom pareil, on se doutait bien qu'il s'agissait d'un groupe français, malgré le fait que la totalité des chansons (aucune reprise) soit en anglais. Les Frenchies est un groupe culte, fondé en 1973 et qui durera jusqu'en 1975, et ne se reformera jamais. Deux célébrités ont fait partie, à deux périodes différentes (pour la seconde, aucune trace discographique officielle - peut-être des bootlegs, mais même là, c'est moyennement probable - n'existe), de ce groupe,  à chaque fois au chant : Martin Dune et Chryssie Hynde. Pour la seconde, oui, c'est bien la Chryssie Hynde des Pretenders, Américaine de l'Ohio, rock-critic au magazine rock britannique NME, qui, alors qu'elle bossait dans la boutique de Malcolm McLaren et Vivienne Westwood en 1974 à Londres, à fait la connaissance d'un protopunk français l'invitant à monter un groupe avec lui en France. Au fil de ses pérégrinations elle a joué, à Paris, dans deux-trois groupes, et a fini par intégrer, en 1975, les Frenchies, qui venaient de se séparer de leur précédent chanteur, Martin Dune. Elle quittera le groupe peu après, ce qui marquera sa fin. On connaît la suite de sa carrière à elle. Et Martin Dune ? Chanteur n'ayant oeuvré qu'au sein des Frenchies (cet album est donc son unique trace discographique en album ; en 1975, il a sorti en solo un 45-tours), il est très connu sous son vrai nom : scénariste et réalisateur, vous avez tous vu au moins trois ou quatre de ses films, tous des comédies, que ce soit Les Visiteurs et ses suites, Le Père Noël Est Une Ordure ou Papy Fait De La Résistance.

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Oui, Martin Dune n'est autre que Jean-Marie Poiré. à droite sur le dessin du recto, et à droite aussi sur la photo du verso (notons que le recto de pochette est, au centre, en découpage : le dessin est en fait sur l'insert des paroles glissé dans la pochette). A l'époque déjà scénariste (pour Michel Audiard, Lautner, Lamoureux), fils du producteur Alain Poiré, Jean-Marie Poiré a donc été chanteur de rock. Du rock protopunk et glam, dans la droite lignée des New York Dolls. Les Frenchies étaient constitués, aussi, de Michaël Memmi (basse), Morgan Davis et Linn Lingreën (guitares) et Olivier "Kiss" Legrand (batterie). Chantant en anglais (paroles signées Poiré/Dune, toutes), le groupe aligne ici un album de 42 minutes du nom de Lola-Cola, qui sera diversement accueilli par la presse française : Rock'n'Folk le défend totalement, d'autres le critiquent ouvertement, et tous sont d'accord : la production de l'album est ratée. Le son est un peu mince. L'album a été mal mastérisé, et il faudra attendre la réédition CD, en 1999 (sur un label indépendant spécialisé en punk), pour que l'album sonne enfin comme il fallait (mais comme Manoeuvre l'a dit, fallait juste mettre le son très fort quand on l'écoute, c'est tout). Chose à dire : Poiré, alias, ici, Martin Dune, signe de super textes, mais chante bien, mais sans plus. Il a une voix hargneuse, très rock, mais on sent bien que ce n'est pas un chanteur de métier, et d'ailleurs, déjà pris à l'époque par des travaux de scénariste cinéma, il ne se consacrera plus qu'à ça (premier film réalisé en 1977). Peu importe ce qu'on pense de ses films, on n'est pas là pour ça. Vocalement, Poiré s'en sort bien, mais évidemment, même si ça cadre bien, ici, avec le son du groupe, il n'est pas le meilleur chanteur qui soit.

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Le groupe assure (Poiré dira qu'en live, le son de la basse était tellement fort qu'il avait l'impression que le son le tabassait), et malgré le mixage un peu foiré (pourtant signé, en partie, John Leckie), sonne très heavy et terriblement rock, Lola-Cola est un monstre du genre, à ranger aux côtés du BBH 75 de Jacques Higelin (sorti la même année). Les deux albums sont deux des fers de lance de la future vague punk en France, et concernant les Frenchies, leur réputation sera assez forte ; le groupe sera même cité dans le NME, en 1975 (quand Chryssie Hynde fera partie du groupe, ceci dit). Les chansons ? Du tonnerre, de l'ouverture Dillinger's Coming au final (long de 10 minutes d'apocalypse !) Lana Turner Cheap Dreams, en passant par Detroit Palmtrees, Sweet Face (unique morceau sur lequel Poiré/Dune est le seul auteur, mais il est crédité partout ailleurs), Love Is A Game et le géniallissime Waiting For Mary Lou (To Join The Band), sans doute le meilleur morceau d'un album qui n'en contient aucun de ne serait-ce que médiocre, et encore moins de mauvais. Un des meilleurs albums de rock français de son époque, et en général. Absolument génial, et qu'est-ce que je suis content (vu qu'il n'est pas super facile à trouver) de le posséder en vinyle d'époque (pressé sur Harvest/EMI), au passage !

FACE A

Dillinger's Coming

Rock'n'Roll Fascination

Mike's Bike

Detroit Palmtrees

Love Is A Game

FACE B

Lola-Cola

Waiting For Mary Lou (To Join The Band)

Sweet Face

Lana Turner Cheap Dreams