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Red est l'album de rupture. Red trace la ligne distinctive entre deux époques, les seventies et les eighties.
Red est aussi l'album de synthèse du crimso', le groupe n'expérimente plus ici...
Et finalement, c'est ce qui est le plus regrettable, il est clair que l'album est quasi-parfait de bout en bout mais sa relative facilité d'accès, empêche l'auditeur de s'y plonger pleinement ( en ce qui me concerne)....
Le crimso' est parfait mais devient par la même occasion, moins intéressant...
Synthèse comme le suggère son titre, le rouge est en alchimie, la couleur qui est censé contenir toute force métallique ( merci, oncle viande...).

King Crimson a toujours été une formation instable, divers changements de line-up, pas un an se passe sans changement.Larks'... a marqué le grand départ de Jamie Muir, Starless... a de son côté marquer le départ de David Cross.
Evidemment, l'album n'est pas joué que par 3 musiciens, divers invités sont venus laisser leur trace sur l'album.
Notamment,Ian Mcdonald, Mel Collins et David Cross.

Un album résolument sombre par ailleurs, un certain Kurt Cobain ( beurk) encensera ce disque, faut dire que, effectivement, cet album aura marqué l'histoire de la musique.
Le groupe invente le grunge sur le magnifique, dépressif et suicidaire Fallen Angel, un de mes morceaux de chevet par ailleurs.
Le métal sur l'intellectuallisant morceau éponyme, morceau instrumental, étonnament assez carré, composé par Fripp.
Ce dernier sera une vraie bouffée d'air frais pour le groupe.
Fripp en fera pas mal de resucée, je pense notamment au morceau Vroom Vroom se trouvant sur Thrak, un album correct mais sans plus ( le concept de cet album est foutrement intéressant mais le groupe n'aura jamais réussi à l'exploiter pleinement).

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Cela dit, un morceau m'insupporte sur ce Red, il s'agit de One More Red Nightmare.
Un morceau qui m'ennuit et me lasse, il est néanmoins sauvé par un superbe solo de saxo.
One More Red Nightmare est la tâche d'encre sur une copie parfaite, le morceau débandant....
Heureusement la suite du disque est elle magistrale.
Je pense notamment au morceau Providence, une improvisation parfaite, très sombre et malsaine.
David Cross est vraiment présent. Son violon a ici une teinte tzigane, genre malédiction, sorcière etc....
Une impro' réellement magistrale, la meilleure du groupe sûrement.
Je pense qu'elle aurait plus eu sa place sur SABB.

L'album se termine sur Starless, le morceau qui clôt la période dorée du groupe.
Evidemment, ce morceau est excellent et est un des fers de lance du groupe, il marque notamment le grand retour du mellotron, l'explosion finale du morceau est dantesque mais elle ne sera jamais , au grand jamais, une de mes pièces favorites... Red est un aboutissement, c'est indéniable mais comme je l'ai dit au premier paragraphe le groupe perd sa patte caractéristique, cette sensation de perdition, le besoin de poser ses repères.... On retrouve cette sensation que sur Providence, la seule impro' du disque.
Néanmoins, un album remarquable.

Note objective: 17/20

Note subjective: 15/20

Critique complémentaire de ClashDoherty :

Attention, claque en perspective. Claque auditive et sensorielle, je veux dire. Claque que vous pourrez retrouver en totalité (39,59 minutes, telle est la durée de cet album comprenant 5 morceaux) en lien de clips, en bas d'article. Red, septième album studio de King Crimson, est un album monstrueux. C'est le dernier volet de leur trilogie métallique commencée avec Larks' Tongues In Aspic en 1973 et poursuivie en 1974, quelques mois avant, par Starless And Bible Black. La pochette donne le ton : noire (malgré le titre qui signifie 'rouge' et est écrit dans cette couleur), avec, une première pour King Crimson, une photographie des trois membres restants, suite au départ du violoniste David Cross (qui joue sur le disque, en invité) : John Wetton (basse, chant), Bill Bruford (batterie) et Robert Fripp (guitare, mellotron, leader) de gauche à droite. Red, c'est pour la couleur de la vie, du sang, qui pulse tout du long de cet album, sinon, d'une noirceur éreintante. Les 40 minutes, à une seconde près, de cet album sont parmi les plus sombres qui soient. Avec Red, le Pourpre a probablement sorti le premier album de grunge de l'histoire du rock, ce qui explique le tag 'grunge' en bas d'article. Pas étonnant que Kurt Cobain a toujours dit que cet album avait été une source d'inspiration, un disque de chevet, un album-clé. De la première à la dernière de ses secondes, Red sonne comme un moribond en sursis, un album désespéré, au bout du rouleau, borderline. D'ailleurs, cet album totalement dans le rouge (allusion au verso de pochette montrant un VUmètre avec l'aiguille dans le rouge, sous le chiffre 7, 7 pour le septième album) sera le dernier de Crimso, qui annoncera son split définitif avant la sortie (en novembre) de Red. Le Roi est mort, vive son sang, vive Red.

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Il y à cependant un truc qui cloche, avec ce septième album : il n'innove pas. Red a beau être techiquement irréprochable, remarquable du début à la fin, il n'apporte rien de neuf par rapport aux précédents opus du Pourpre. Par rapport aux deux premiers albums, Lizard était totalement différent. Idem pour Islands, puis pour Larks' Tongues In Aspic. De même, Starless And Bible Black était un peu différent plus expérimental et extrémiste. Red, quant à lui, semble allier le côté métallique de Larks' Tongues In Aspic et le côté sinistre, sombre, de Starless And Bible Black. Sans rien apporter de plus. L'album est très sombre, les paroles des chansons (Richard Palmer-James à l'écriture, pour la dernière fois dans le groupe) sont froides, tristes, sans appel. Mais il n'y à pas d'innovation musicale, le groupe se contente de reprendre la formule des deux précédents albums, pour en faire une synthèse. Synthèse grandiose, certes, et Red est vraiment un des sommets du groupe, un album inlassable, on l'écoutera encore avec autant de passion et d'admiration dans 30 ans, dans 50 ans...mais, quelque part, on est un peu frustré ; l'album, en plus d'être trop court, aurait pu être un peu innovant, apporter quelque chose de plus, quelque chose de pas définissable vu que ce petit 'plus' n'existe pas, mais quelque chose qui, certainement, aurait rendu Red encore plus puissant.

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Verso de pochette

Enfin, on ne va pas épiloguer dessus, Red est ainsi, ça ne changera jamais, alors mettons-nous dès à présent à parler de ce que le disque nous offre. Cette claque incessante de 40 minutes. Il faut dire qu'en tant que bouquet final, Crimso nous offre les petits plats dans les grands. David Cross, parti officiellement du groupe, participe (violon) en guest, et on a aussi, en guests, attention les yeux, Mel Collins (saxophone soprano), Ian McDonald (saxophone alto), qui ont tous deux fait partie du groupe (Collins de 1970 à 1972, McDonald sur le premier opus de 1969) ! On a aussi Mark Charig (cornet) et Robin Miller (hautbois), qui ont participé, en invités, aux albums Lizard et Islands, en 1970/71. Red, un retour aux sources, tout en étant dans le prolongement des deux précédents albums ? Quand même pas. Même si entendre du mellotron sur Starless, magnifique morceau final de 12 minutes 20, fait plaisir, ça faisait depuis 1971 qu'on n'en avait pas entendu aussi longuement, clairement, sur un album du groupe. Mais, définitivement, Red n'est pas du Crimso à l'ancienne. L'album commence par les 6,20 minutes du morceau-titre, instrumental saisissant s'ouvrant sur un riff destructeur de messire Fripp. Qu'on imagine souriant en coin sur son tabouret, dans sa barbounette (il s'est, d'ailleurs, coupé les cheveux, ça lui va mieux que cette chevelure de musaraigne afro qu'il arborait depuis 1969), prenant plaisir à faire souffrir les oreilles des fans avec ces riffs bien sanglants et sournois. Red est une claque en intro, un morceau qui prend aux tripes et ne relâche plus l'auditeur. Comme Leslie Barsonsec, chroniqueur occasionnel du blog, l'avait dit, Red est, pour lui, du heavy metal, tout simplement. Pas faux. En tout cas, ce morceau en est. On en sort difficilement, et c'est pour être happé par la sinistrose ambiante de Fallen Angel, morceau imparable, de sensiblement la même durée, chanson racontant la triste fin d'un petit voyou membre d'un gang, se faisant tuer devant son jeune frère dans une rixe. Là, on est dans le pur grunge. John Wetton n'a jamais aussi bien chanté que sur cet album, lui qui chantait bien (mais sans crier au génie) sur Larks' Tongues In Aspic et qui, sur les rares passages chantés de Starless And Bible Black, était déjà plus convaincant. Sur Red, il est au zénith. Tout le groupe l'est, au zénith, ici, d'ailleurs. Le final de Fallen Angel, avec ce saxophone, est à tomber. On passe ensuite aux 7 minutes de One More Red Nightmare, pour KingStalker (chronique plus haut) le point faible de l'album, mais pas pour moi (Red n'ayant pas de point faible). Si on excepte le riff qui n'est pas original (Smoke On The Water de Deep Purple, vous connaissez ? Alors, comparez !), ce morceau (aussi chanté) s'achevant lui aussi sur un saxophone dantesque est une tuerie de plus, bien sombre comme il faut. Arrivé à ce stade, l'auditeur n'a plus d'espoir à avoir, il sait que Red est totalement noir, et que la face B sera identique à la A, une plongée en eux troubles comme on ne écoute que rarement.

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Premières pages du livret CD 2004

Cette seconde face s'ouvre sur le deuxième instrumental de l'album (et le dernier), Providence. 8 minutes faisant penser à The Talking Drum (Larks' Tongues In Aspic) et à tous ces instrumentaux du précédent album (We'll Let You Know...) qui furent enregistrés live (je parle de ceux du précédent album). Providence est en effet une improvisation totale, sur laquelle l'ambiance est très prenante et oppressante, entre ce violon, cette guitare agressive, cette tension latente, qui ne demande qu'à exploser, qu'à se répandre... Providence a été enregistré live au cours d'un concert donné dans la ville de Providence, dans le Rhode Island, un des Etats les moins connus des USA. On peut trouver d'autres extraits de ce concert donné en juin 1974 sur le premier disque du longbox 4-CDs The Great Deceiver : Live 1973/74, et parmi ces extraits, Lament, Exiles, Fracture, et une version sensiblement plus longue de ce Providence, sous le titre de Improv. : Providence. Un morceau génial, jamais chiant malgré sa longueur, et même s'il est assez difficile d'ouvrir une face sur un tel morceau, il aurait été assez con de la foutre en final et de faire ouvrir la face B sur Starless (12,20 minutes), qui suit et est donc le final, morceau chanté absolument dantesque, utilisant le titre du précédent album dans ses paroles (le refrain est Starless and bible black). Starless fout sur le cul, tout simplement. Que dire face à tel morceau ? Qu'il fout sur le cul, tout simplement. Et en plus de foutre sur le cul, tout simplement, Starless s'impose comme le chant du cygne absolu de King Crimson, rappelons que ce disque est sorti peu après l'annonce publique du split du groupe. Leur carrière s'achève sur ce Starless imparable, doux-amer, rempli de tension latente dans sa longue section instrumentale mais, mis à part ça, plein de mélancolie, de spleen, de tristesse insondable (la voix de Wetton, le mellotron)... Non, vraiment, ça fout sur le cul, tout simplement. Une fois le disque fini, on est estomaqué, on se demande comment une telle beauté sonore peut exister sans avoir été interdite car trop belle, trop parfaite pour être honnête. Oui, je sais, j'exagère un peu, mais écoutez donc, pour juger par vous-mêmes !

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Red est un disque intense, morbide, froid, noir et rouge. Noir pour la noirceur (évident, non ?) des textes, et rouge pour cette violence qui pulse comme du sang, sur certains passages. Premier vrai album de grunge, enfin selon moi, c'est une oeuvre forte, extrême, brutale, saignante, mais aussi très subtile et mélancolique, un des disques les plus dépressifs jamais enregistrés, par un groupe qui se savait mort et a tout donné en bouquet final. Sans se douter que sept ans plus tard, Fripp reformerait le groupe, avec le batteur Bill Bruford, et deux nouveaux comparses pour remplacer Wetton et Cross. Mais ça, j'en reparlerai demain, car en attendant, et ça, ça sera tout à l'heure, il restera à aborder un album live sorti un an après la mort de King Crimson, album assez méconnu, oublié, et même dénigré, qui ne fera pas beaucoup parler de lui à sa sortie en 1975, mais qui est, quand même, plus qu'appréciable : USA...

 

FACE A

Red

Fallen Angel

One More Red Nightmare

FACE B

Providence

Starless