Pour ce nouveau et 261ème Track-by-track, un des meilleurs albums du trio de rock progressif anglais Emerson, Lake & Palmer, sorti en 1972, leur quatrième album : Trilogy. Il ne s'agit pas d'un triple album, ni d'un album ne contenant que trois titres, ni du premier ou dernier volet d'une trilogie (Trilogy est aussi le nom d'un morceau de l'album), contrairement à ce que son titre étonnant peut laisser penser. En fait, c'est Trilogy, car on distingue trois grands mouvements : le premier est symbolisé par les trois premiers morceaux, et les deux autres, par les morceaux 7 et 9, les deux plus longs. C'est un album qui aura un assez beau succès, et regorge de grands classiques du groupe. Un disque qui ravira les fans de rock progressif et consternera ceux qui détestent ce genre de musique (on se demande, dans ce cas, s'ils prendront la peine d'écouter les 42 minutes de l'album). Ce disque, sorti sous une assez belle pochette (à l'intérieur, une photo du groupe dans les bois, chacun des membres étant reproduit plusieurs fois à divers endroits), le voici :
The Endless Enigma (Part One) : Dans un sens, on peut remarquer trois segments à Trilogy, qui mériterait ainsi encore plus son titre. The Endless Enigma, scindé en trois parties, est un de ces segments. Cette première partie est un des morceaux les plus longs de l'album avec 6,40 minutes, et ça démarre par une partition étonnante, un peu free, de piano, par Emerson, avec effets sonores assez glauques (battements de coeur, en intro, avant le piano) en arrière-plan, ambiance oppressante. Piano assez dingue, à la fois léger et sombre, avant que, dès la deuxième minute, la batterie et la basse (Palmer et Lake) ne fassent leur apparition. Le thème principal fait alors son entrée. Ainsi que la voix de Lake, si belle, si touchante. Lake alterne admirablement, ici, entre douceur et énergie. Final qui fait revenir le piano free d'Emerson. Dans l'ensemble, The Endless Enigma (Part One) est tout simplement grandiose.
Fugue : 1,55 minute seulement pour Fugue, qui marque la deuxième partie de The Endless Enigma malgré le titre du morceau suivant. Sublimissime partition de piano, pas du tout free ici, mais très classique. Keith Emerson est un claviériste tout simplement virtuose, il le prouve ici totalement. Fugue, totalement instrumental, permet à l'auditeur de souffler un petit peu avant la fin de ce premier segment.
The Endless Enigma (Part Two) : 2,05 minutes seulement pour The Endless Enigma (Part Two). Retour de la voix de Lake, qui reprend le thème vocal de la première partie. Dans l'ensemble, ce morceau trop court sert plus à conclure ce premier segment qu'à autre chose, il n'apporte pas grand chose de plus (mis à part des synthés très présents). C'est très bien foutu, ceci dit !
From The Beginning : 4,15 minutes. From The Beginning, signée Lake, est une merveille acoustique qui sortira en single (avec Living Sin en face B). C'est un des morceaux les plus mythiques d'Emerson, Lake & Palmer, un morceau plus folk-rock que rock progressif (comme je l'ai dit, c'est acoustique, enfin, à prédominance acoustique, guitare sèche, batterie distante). Le chant de Lake est tout simplement monumental, From The Beginning est clairement le genre de morceau qui, avec Epitaph de King Crimson (Lake a fait partie de ce groupe mythique sur leurs deux premiers albums) et The Sage (d'Emerson, Lake & Palmer, sur Pictures At An Exhibition), prouve le talent vocal de ce musicien. Sublime.
The Sheriff : Morceau encore une fois d'une durée assez sobre (3,22 minutes) que ce The Sheriff signé par Emerson et Lake. Mais si Carl Palmer n'a pas de crédits sur le morceau, il n'en offre pas moins un court mais très sympathique solo (de batterie) en intro ! Synthés assez envahissants et pas totalement grandioses, mais le chant de Lake assure totalement. Se finissant en solo de piano à la sauce honky-tonk assez amusant (une caricature), The Sheriff est un morceau sympathique, ne comptant pas parmi les sommets de Trilogy ou de ELP, mais c'est, ma foi, excellent (le morceau est un peu surestimé dans le répertoire du groupe, ceci dit).
Hoedown : Achevant la face A, Hoedown est un classique absolu pour Emerson, Lake & Palmer. Un instrumental signé Aaron Copland (un musicien né en 1900, mort 90 ans plus tard), issu d'une pièce musicale du nom de Rodeo. Inutile de dire que cette réappropriation de Hoedown est très progressive et différente de l'originale ! N'empêche, ce morceau est tout simplement immense, cultissime, un instrumental pas très long (3,50 minutes) et très réjouissant, interprété par un groupe en grande forme. Hoedown est un des morceaux les plus essentiels d'ELP en concert, un moment obligé pour eux sur scène.
Trilogy : La face B s'ouvrait sur le morceau-titre, Trilogy, donc, qui est le plus long de l'album, 8,55 minutes (ce n'est pas le plus long de beaucoup). Ca démarre très calmement, le chant de Lake, doux, touchant, et une partition de piano très classique, reposante, d'Emerson. Sorte de deuxième grande partie de l'album (les morceaux allant de From The Beginning à Hoedown, ainsi que le suivant, sont un peu à part des trois grands segments de Trilogy, dans un sens), Trilogy passe ensuite à la sauce progressive, avec apparition de la batterie et des synthés. Le morceau s'emballe progressivement (le mot est bien choisi, hein ?), et devient du ELP pur jus. Sans doute trop de claviers envahissants, mais ce morceau, très proche du son de Genesis (de la même période) n'en demeure pas moins excellentissime.
Living Sin : Seulement 3,10 minutes pour ce morceau qui sortira en face B de single (face A, comme je l'ai dit plus haut : From The Beginning), Living Sin. Franchement un peu mineur, pour ne pas dire beaucoup, ce morceau est le moins bon de l'album. Ambiance un peu boogie pour ce morceau vraiment court, interprété par un Lake à la voix assez étrange, plus rauque et grave que de coutume, méconnaissable (s'il ne poussait pas, de temps à autre, des voix plus 'classiques', j'aurais dit que ce n'était pas Lake qui chante ici, mais c'est bien lui). Living Sin est un morceau un peu fantôme, coincé entre deux monstres, et qui, franchement, s'écoute sans passion, avec un ennui poli et vaguement intéressé. Vraiment mineur, presque médiocre en fait...
Abaddon's Bolero : Deuxième morceau le plus long avec 8,15 minutes, et dernier gros bloc de Trilogy après The Endless Enigma et Trilogy, voici Abaddon's Bolero. Le titre se veut une allusion au Boléro de Maurice Ravel, et Abaddon est le nom biblique donné à l'ange exterminateur dans l'Apocalypse. Bien qu'un peu long (l'intro est longuette, répétitive), Abaddon's Bolero est tout de même un excellent morceau, instrumental par ailleurs, qui prouve encore une fois la virtuosité de ces trois musiciens, formant plus un super-groupe qu'un groupe classique en fin de compte (comme ce fut le cas pour Derek & The Dominoes ou Blind Faith, ou plus récemment Mad Season et Them Crooked Vultures). Intro très calme (mélodie assez lointaine), mais ça ne durera évidemment pas. Rien que le titre du morceau (rappelez-vous à quoi correspond Abaddon) en dit long. Pas le sommet absolu de Trilogy, mais il achève vraiment bien cet album essentiel du rock progressif !
Au final, Trilogy est, avec son lot de classiques (Hoedown, From The Beginning, le morceau-titre), un des meilleurs albums d'Emerson, Lake & Palmer (ou ELP), un disque fantastique qui fait suite au très très réussi live Pictures At An Exhibition et sera suivi d'un Brain Salad Surgery immense (leur meilleur opus studio) en 1973. Interprétation hors pair, morceaux de grande qualité, excellente production (de Lake), cet album ravira les fans de rock progressif, mais, comme je l'ai dit plus haut, si ce n'est pas votre genre musical, mieux vaut passer votre chemin, car ELP, contrairement à Genesis, n'est pas un groupe qui vous fera aimer le progressif si ce n'est pas le cas avant l'écoute de leurs albums. Mais pour un amateur, Trilogy est un disque essentiel et inoubliable !
Le son de synthé qu'on entend par exemple sur le titre "Hoedown" est en fait un orgue Hammond, sans doute un B3. Très utilisé sur tous leurs disques, cet orgue avait à la base été inventé pour remplacer les couteux et encombrants orgues à tuyaux dans les églises... Mais c'est le jazz et le rock qui ont propulsés cet instrument au son si particulier. Pratiquement tous les groupes l'ont utilisé ! Deep purple, le Floyd, Genesis, YES, les Doors, Santana etc, la liste est sans fin !
J'adore ce son un peu rétro mais vachement riche en fait. On l'associait souvent avec une cabine "Leslie" qui était un HP qui pivotait sur un axe entrainé par un moteur à deux vitesses qui donnait un effet dans le style Flanger et une amplification à tubes qui saturait lorsqu'on poussait le potar (le son de deep purple in rock).
Je n'ai bien sur pas les moyens de me payer ce bestiau de 200 kg de métal et de bois, mais j'ai une excellente émulation MIDI de l'engin (Native.Instruments.B4) que j'utilise parfois dans mes compos. Si on y ajoute un Melotron ça le fait pour le son progressive des 70'