Pour ce 191ème Track-by-track, un disque assez méconnu et cependant fantastique, première oeuvre solo de Ray Manzarek (claviériste des Doors, et leur bassiste occasionnel aussi). Cet album, sorti en 1974, pendant longtemps introuvable en CD jusqu'à il y à une dizaine d'années, c'est The Golden Scarab, une sorte d'album conceptuel tenant d'un peu de tout, musicalement parlant, et que je vais classer en rock progressif par défaut. Engistré avec des musiciens aussi talentueux que Joe Walsh (guitare), Jerry Scheff (basse), Tony Williams (batterie) ou Larry Carlton (guitare), Manzarek jouant évidemment de tous les claviers, The Golden Scarab est un disque new-age, un album mystique comme sa pochette qui fait allusion à l'Egypte, et il n'y à pas d'album plus éloigné du son Doors (malgré des paroles parfois évidentes, rendant hommage à Jim Morrison ou au groupe) que celui-ci. L'album, que voici, est aussi complexe que fantastique :
He Can't Come Today : Les 43 minutes de l'album commencent par une mélodie de salsa et la voix de Manzarek disant (en spoken-word) une courte introduction : In the beginnng was the rhythm, but I had forgotten and was waiting for the word. La majorité des morceaux de l'album se font introduire de la sorte). Mélodie latino/salsa assez entraînante mais, aussi, très étonnante et déconcertante, surtout en ouverture d'album. Le morceau est aussi très rock, on a un mélange, ici, entre mélodies salsa et envolées assez rock de guitares. De belles percussions latino, aussi, et des paroles qui font sans doute allusion à Jim Morrison (We need a leader, we need a master, wan can't do it all on our own/We need a guru, we need a boo hoo, We're afraid of being alone/He's got the answers, he knows the reasons, he'll tell us what to do, but He can't come today...) La chanson se finit en délire rock/salsa assez indescriptible. Au final, franchement bon.
Solar Boat : And myself said to me "Why are you waiting ? I've always been at your side, can't you see me ? No ? Well, then come with me, it's time you lean to see !" Là aussi, les allusions aux Doors sont très présentes, via le refrain, qui cite Moonlight Drive, même si c'est rapide et facile. Solar Boat est une chanson tout simplement superbe, aérienne, ayant tout du tube, même si elle ne sortira pas en single (l'album, à sa sortie, restera confidentiel). Le chant de Manzarek (un très bon chanteur qui, après la mort de Jim, se partagera le chant, au sein des Doors, avec Robbie Krieger, sur les deux albums faits en 1971 et 1972), le chant de Manzarek, donc, est superbe. L'ambiance qui plane tout du long de cette chanson est assez indescriptible, et on a droit à un très beau solo de guitare (de Carlton, il me semble) en prime. Une chanson qui fait partie des toutes meilleures de l'album.
Downbound Train : But now we must descend for there is another side to this vision. Downbound Train est une reprise (quelque peu trafiquée) de la chanson de Chuck Berry, de 1956. Intro très boogie à base de piano, guitare lointaine et très efficace, ambiance trépidante, chant assez énervé, Downbound Train est à ce moment le morceau le plus rock de The Golden Scarab. Morceau franchement sympathique, assez enlevé, mais c'est aussi le moins incroyable de la face A, il est surtout coincé entre deux morceaux tout simplement grandioses, et entre eux deux, il semble un peu faiblard (tout en étant franchement rock : un solo de claviers très doorsien, des ruades de batterie franchement ahurissantes, des giclées de guitares également excellentes...). Mais Downbound Train, tout en étant moins grandiose que les précédentes chansons et que la majorité des suivantes, n'en demeure pas moins un très très très bon morceau à écouter absolument.
The Golden Scarab : If you ever have the fear, say these names, they will help you remember the sun. Monstrueux. Ligne de basse inoubliable, claviers entêtants, la voix de Ray citant Amenhotep, Akhenaten, Nefertiti, Tutanhkamun, All of life is sunlight, Osiris is the night, Aten of the aylight, bring your golden life. The Golden Scarab, pièce maîtresse de l'album qui lui doit son nom, est un morceau incryoyable qui, en 6,30 minutes (morceau le plus long, mais pas de beaucoup : le suivant dure 5 secondes de moins seulement), achève la face A sur une profession de foi new-age, tout simplement. The Dream, the Sun, the One ! clame Manzarek dans le centre de la chanson. Jazzy et doorsienne, la chanson aurait pu être interprétée par Morrison, aurait pu se trouver sur un album des Doors. C'est le chef d'oeuvre de l'album et un des meilleurs morceaux que je connaisse, dommage qu'il ne soit pas connu...Difficile pour moi d'en parler. Précisons juste que ce 'Scarabée d'Or' (le titre) n'est autre que le Khepera, symbole de la réincarnation et du soleil dans l'Egypte antique.
The Purpose Of Existence Is ? : Now you must use your mind as well as your eyes. Can you answer these questions ? C'est donc le deuxième plus long morceau de l'album, et il ouvrait la face B sur une note très classique, puisque The Purpose Of Existence Is ? commence par une reprise (à base d'orgue) d'un air de musique classique, l'Adagio d'Albinoni, que je n'ai pas besoin, je l'espère en tout cas, de présenter. Ca dure une minute environ, puis, après la courte introduction en spoken-word, le morceau (dont le titre signifie 'Le but de l'existence ?') commence. Très jazzy. C'est le morceau le plus jazzy de l'album, c'est même le seul morceau jazzy de The Golden Scarab. Franchement très très réussi. Do you think the purpose of existence is t pass out of existence ? ... Then, why are you living, what did you come here for ? Questions existentielles s'il en est ('Pourquoi es-tu sur Terre', etc).
The Moorish Idol : And then I was alone. But it had been too much for me and I was confused. I sought refuge in false idols. Un instrumental au titre assez...éloquent. Entre Morrison et 'Moorish', il y à de la ressemblance, non ? The Moorish Idol est un morceau assez spécial, qui commence par des synthétiseurs assez spatiards et un riff de guitare qui s'entremêle dans des giclées de synthés à la Jean-Michel Jarre/Vangelis. Etrange. Batterie remarquable (Tony Williams est un bon), sans doute les synthés sont-ils trop présents et caricaturaux, ça fait vraiment J-M Jarre, je ne plaisante pas... Le morceau dure 5,25 minutes, et n'est pas le meilleur, ni le moins exemplaire d'ailleurs, de la face B (pour moi, c'est le suivant, qui est même le morceau le moins exemplaire de tout l'album), mais The Moorish Idol est vraiment bizarre et ne plaira pas à tout le monde. De toute façon, l'album est très éclectique !
Choose Up And Choose Off : And in my confusion, I became Judge and Jury. Comme je l'ai dit un peu plus haut, pour moi, Choose Up And Choose Off (4,30 minutes) est le morceau le moins exemplaire de The Golden Scarab. Ce n'est pas mauvais, cependant. Ca commence comme un morceau classique des Doors, piano remarquable, guitare à la Robbie Krieger, chant saccadé. Vraiment un des morceaux de l'album qui auraient pu se trouver sur un disque des Doors, par exemple Morrison Hotel. Ou un des deux albums des Doors faits après la mort de Jim (Other Voices et Full Circle). Mais c'est un morceau sans grande originalité. Choose Up And Choose Off n'est pas mauvais, mais un peu insignifiant, malgré une musique franchement sympathique. C'est le morceau dont on ne se souvient quasiment jamais à chaque fois qu'on remet l'album sur la platine, alors que les autres morceaux ont tous quelque chose qui marque l'auditeur, que cela soit la mélodie, le chant ou les paroles.
Oh Thou Precious Nectar Filled Form (Or) A Little Fart : Finally I was back at the beginning and I could start a new dream. Et le final, en 4,45 minutes, de ce disque si étrange. Quel titre étonnant (et un peu ridicule, 'fart' signifiant 'pet', je crois) ! Assez étonnante manière de finir l'album. Rappelez-vous les mélodies salsa de He Can't Come Today. Hé bien, pour Oh Thou Precious Nectar Filled Form (or) A Little Fart, c'est à peu près pareil, en moins évident cependant. Belle mélodie boogie en intro, le morceau démarre bien (et est, de toute façon, très bon). Le morceau s'emballe un peu, progressivement, au fur et à mesure. Une belle manière de finir un disque très étrange et à découvrir absolument.
Au final, The Golden Scarab, album assez sous-estimé et méconnu, est une oeuvre franchement inclassable qui mélange rock, rock progressif, blues, jazz, salsa, rumba (et autres musiques world) et expérimentations, pour un résultat détonnant, même s'il faut nettement plusieurs écoutes attentives pour venir à bout de l'album et vraiment l'apprécier. La première écoute sera sans doute difficile, si vous êtes intéressés par ce disque franchement remarquable et étonnant, vrai manifeste de la pensée new-age. Je précise que les phrases en anglais au début de chaque paragraphe sont les introductions de chaque morceau, prises dans le livret qui contient, heureusement, les paroles. Un disque franchement remarquable qui prouve le talent de Manzarek. Son album suivant sera moins marquant...
sinon je tiens à te remercier pour ton travail sur ce blog que je suis régulièrement depuis près de 7 mois. J'ai découvert un bon paquet d'albums qu'ils soient des classiques ou plus expérimental(je n'avais pas une grande culture musical)
donc voila encore merci pour ton blog et continue comme ça!