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Pour ce 60ème Track-by-track, un de mes albums de chevet par excellence, et un disque un peu particulier, Moonflower, double album de Santana sorti en 1977 sous une sublimissime pochette (le disque est toujours double en CD). Particulier, ce disque, car à la fois live et studio. Comme Wheels Of Fire de Cream ou Ummagumma de Pink Floyd, donc. Mais contrairement à ces deux albums, Moonflower ne propose pas un disque live et un disque studio, mais un mélange entre les deux genres, sur chaque disque. L'effet est si réussi que certains pensent que ce disque est totalement live (l'absence d'applaudissements sur les titres studios, et la précision sur la pochette devraient cependant suffire à éviter cette méprise) ! A noter que l'album est quand même plus live que studio : environ 54 minutes d'enregistrements live pour environ 32 minutes d'inédits enregistrés en studio. Allez, on commence :

CD 1 :

Dawn/Go Within : Petite introduction instrumentale en deux temps (une seule plage audio), assez courte au final, car faisant moins de 3 minutes. Un morceau enregistré en studio, à l'ambiance éthérée, aérienne, lounge, avec une partition de piano électrique (Tom Coster) de toute beauté. Passe-partout et agréable ! A noter, l'enchaînement avec Carnaval, morceau live, qui est excellent (on croirait que Dawn/Go Within est live, or, non) !

Carnaval : Premier morceau live, et pas le meilleur, mais indissociable des deux suivants. Carnaval, issu de l'album Festivàl (1976, le précédent opus de Santana, et un des moins bons), est un morceau court (moins de 3 minutes) et assez festif, chanté en espagnol et en anglais (Vamonos, vamos a carnaval...), un morceau léger comme une bulle de savon, pas original, mais, ici, bien interprété. C'est, que ce soit sur Festivàl ou sur cet album, le premier volet d'une trilogie de morceau, heureusement respectée ici.

Let The Children Play : S'enchaînant immédiatement après Carnaval, Let The Children Play, issu aussi de Festivàl, est donc le deuxième volet de la trilogie, un morceau également court, et franchement excellent, interprété en anglais, et démarrant par une belle envolée de guitare de Carlos. Là encore, c'est simple, efficace, pas très original, mais franchement agréable !

Jugando : Enfin, dernier volet de la trilogie de morceaux issus de Festivàl, et se suivant sur les deux albums, Jugando, un morceau instrumental juste puissant. Quel solo de guitare ! Une ambiance latino indescriptible, que l'on trouve sur pas mal de morceaux du groupe par ailleurs. C'est le dernier titre live de la face A, face contenant le plus de titres en général (6). C'est juste remarquable, mais, encore une fois, court. Pour les longs titres, c'est à partir de la face B !

I'll Be Waiting : Retour aux enregistrements studio, avec I'll Be Waiting, morceau remarquable et très apaisant, interprété de voix de maître par Greg Walker. Je peux me tromper, mais je crois que ce morceau, long de 5 minutes, sortira en single, dans une version un peu plus courte (il y aura un ou deux autres singles issus de Moonflower : un titre live, et un titre studio). Superbe petit solo de guitare, dans les normes santanesques, et ambiance lounge parfaite. Reposant, calme, ce morceau sera sans doute critiqué par les rockeurs, car ne balançant pas assez, mais les amateurs de bonne musique devraient apprécier !

Zulu : Encore un morceau remarquable (et enregistré en studio), que ce Zulu ! Achevant la face A, c'est un instrumental en deux temps, commençant (et se finissant, aussi) par une partition de piano assez rapide et sombre (notes graves), accompagné d'un jeu de batterie (Graham Lear) assez syncopé. Le morceau finit par s'emballer, avec un solo de guitare, toujours parfait, de Carlos. Retour au calme, retour au piano, pour le final. Court, mais excellentissime.

Bahia : Le morceau le plus court de l'album. Bahia, qui ouvre la face B, permet à cette face B de ne pas être totalement live, mais bon, il ne dure que 1,25 minutes, cet instrumental ! C'est donc de très peu que la face B ne soit entièrement live. Qui dit court ne dit pas forcément moyen, même si, en l'occurrence, il y à mieux que Bahia ici, sur Moonflower. Mais son ambiance latino, brésilienne (Bahia est au Brésil), avec moult percussions, est inimitable. L'enchaînement avec le titre suivant est si parfait qu'on croirait que Bahia est live, ce qui n'est pas le cas !

Black Magic Woman/Gypsy Queen : Que dire ? Séparées en vinyle, les deux parties de Black Magic Woman/Gypsy Queen, morceau initialement présent sur Abraxas de 1970 (un des meilleurs albums du groupe), sont ici réunies sur une seule plage audio de 6, 30 minutes. On connaît tous ce morceau légendaire, à la première partie chantée (morceau de Fleetwood Mac, une reprise), tout simplement somptueuse ici, et à la deuxième partie, instrumentale (et reprise d'un morceau de Szabo), tout simplement grandiose, solo de guitare infernal, progression haletante, final admirable. Un grand moment, et de Santana, et du live.

Dance Sister Dance (Baila Mi Hermana) : 7,45 minutes live, morceau initialement présent sur Amigos de 1976 (une grosse vente). Probablement un peu trop long, même si la partie finale et instrumentale, rythmée par l'orgue électrique de Tom Coster (qui apporte une touche très aérienne, vaporeuse à l'ensemble, plus que sur la version studio), est loin d'être mauvaise. Mais ce morceau, tout en étant sympa, est un peu trop long, et si la guitare de Carlos est, comme toujours, parfaite, les refrains (Baila, mi hermana...) sont un peu répétitifs et chiants, à la longue. Enfin, je trouve.

Europa (Earth's Cry, Heaven's Smile) : Instrumental issu de l'album Amigos, et que dire à son sujet ? Un des plus grands instrumentaux de l'histoire du rock, un tube immense à sa sortie en 1976, et la version live de Moonflower est tout aussi belle, avec 6 minutes au compteur. Beau à pleurer, un slow vaporeux, rythmé par l'orgue de Coster et la guitare toujours parfaite de Carlos, solo magnifique, magistral. Avec Europa (Earth's Cry, Heaven's Smile), on tutoie le Très-Haut. Le premier disque se finit donc en beauté !

CD 2 :

She's Not There : Morceau studio très réussi que ce She's Not There, et qui sortira en single. C'est évidemment une reprise de la fameuse chanson des Zombies, ce groupe de pop/rock anglais des années 60, et c'est une très très bonne reprise lounge, Greg Walker l'interprète avec beaucoup de talent. Où comment faire d'une petite chansonnette pop psychédélique des années 60 une chanson latino/lounge des années 70 ! Superbe jeu de guitare de Carlos, pour ne pas changer.

Flor D'Luna (Moonflower) : Sublimissime instrumental enregistré en studio, et ayant donné son nom à l'album. Avec Flor D'Luna (Moonflower), on est proche de Europa (Earth's Cry, Heaven's Smile) ou de Zulu, à savoir, une magnificence instrumentale absolue, ambiance parfaite, solo sublimissime, pas d'ennui pour l'auditeur, une musique certes très accessible, mais magnifique !

Soul Sacrifice/Head, Hands & Feet (Drum Solo) : La grosse viande de cette face C (et le morceau qui l'achève). Unique morceau live de la face C, ce morceau, agrémenté ici d'une partie 'solo de batterie' de Graham Lear (coicnée au beau milieu du morceau) est initialement issu du premier album éponyme (Santana) de 1969. Soul Sacrifice, qui a très souvent donné lieu à des interprétations pharaoniques en live, fut joué à Woodstock, devant un parterre de spectateurs médusés. Ici, c'est, tout compris, 14 minutes de folie pure, le morceau le plus long de Moonflower (mais pas de beaucoup !), un moment ahurissant qui contient son lot de soli divers et possède une ambiance de feu inimitable. Grandiose !

El Morocco : La face D s'ouvrait sur El Morocco, instrumental enregistré en studio, remarquable et possédant une ambiance à la Zulu là aussi. Ce morceau de 5 minutes est mon préféré de tous les titres studio de Moonflower, tout simplement, un instrumental saisissant, ambiance parfaite, tension palpable et magnificence sonore absolue. En fait, quasiment indescriptible, il faut écouter !

Transcendance : Dernier morceau studio de l'album, et on le sent. Il est chanté, et la voix de Greg Walker est juste parfaite ici. On l'entend, vers la fin du morceau, dire au revoir aux auditeurs, il leur demande de continuer à sourire à la vie jusqu'à la prochaine rencontre, ça fait très sympa. Un autre grandiose moment de l'album, avec une guitare on ne peut plus aérienne de Carlos, une atmosphère planante indescriptible. Transcendance est un grand moment, tout simplement !

Savor/Toussaint L'Overture : Enfin, morceau achevant l'album, et enregistré live, Savor/Toussaint L'Overture (sur le vinyle, les deux parties sont séparées). En tout, 13 minutes (durées à peu près égales pour les deux parties, entre 6 et 7 minutes chacune donc), deux instrumentaux se regroupant admirablement. Savor vient du premier album du groupe, et est une décharge électrique absolue, grandiose. Toussaint L'Overture, qui doit son titre à un célèbre Haïtien, est un autre grand instrumental, mais issue du troisième album (Santana III) du groupe, de 1970. Et est encore meilleur. L'ensemble de cette interprétation live est absolument fantastique, quelle belle manière de finir l'album !

 A l'arrivée, un double album admirable. Les enregistrements studio inédits sont excellents, qu'ils soient chantés ou, surtout, instrumentaux, et quant aux titres live, ils sont juste parfaits, la vraie viande de l'album (ils datent de concerts à l'Hammersmith Odeon, à Londres, en 1976). Au final, on a, avec Moonflower, un des sommets de Santana, un des albums les plus cultes et réussis (et une énorme vente, gros succès commercial) de ce groupe mexico-américain. Alors renommé Devadip Carlos Santana et en pleine période mystique, le guitariste mexicain offre ici, avec son groupe de l'époque (Greg Walker au chant, Tom Coster, Raul Rekow, David Margen, Graham Lear, Pete Escovedo...), un condensé de rock teinté de jazz et de musiques latino. Immense !