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Pour ce nouveau Track-by-track, un album sublime, pour moi le meilleur de Nick Cave & The Bad Seeds : Murder Ballads, sorti en 1996. Pour ce disque, Nick Cave s'est entouré, pour quelques chansons, de P.J. Harvey, Kylie Minogue ou Shane McGowan (chanteur des Pogues). L'ensemble de ce disque, que ce soit des reprises ou des originaux, est constitué de chansons parlant de mort, de meurtres, de faits divers, des chansons parfois légères, parfois plombantes, parfois mélancoliques, parfois brutales, toujours glauques et sordides. Un sous-genre de chanson populaire anglo-saxon auquel Nick Cave, ici, rend hommage !

Song Of Joy : Imparable chanson (longue, aussi, plus de 6 minutes) ouvrant magnifiquement bien l'album. L'histoire tragique et éprouvante d'un médecin qui, un jour, alors qu'il part de chez lui pour partir en consultation, laisse, chez lui, sa femme bien-aimée et leurs enfants, dans leur maison isolée. En rentrant chez lui, il les découvre assassinés, horriblement. L'assassin est toujours en fuite, et lui, il est devenu mendiant, errant, sa vie anéantie...Mais il y à quand même quelque chose qui me fait réfléchir : les citations littéraires dans la chanson plus certains passages peuvent éventuellement faire penser que le mec serait lui-même l'assassin. Mais non, non, ça serait trop...enfin, on ne sait pas...oh, quand même...

Stagger Lee : Le fameux Stagger Lee, bandit de l'Ouest à la peau, il me semble, basanée, et immortalisé par plusieurs chansons. Ici, c'est une reprise, et une des meilleures chansons de l'album. Très violente et vulgaire (I'm that bad motherfucker called Stagger Lee !), elle raconte l'histoire de Stagger Lee, qui fait un vrai carnage dans un saloon, un jour où le barman, puis des clients, viennent l'emmerder. Il leur explique, flingue en main, qu'il est Stagger Lee, et bute tout le monde ou presque. La morale ? Y'en à pas, colonel ! Ou alors, faites pas chier ce mec...

Henry Lee : Magnifique chanson en duo avec PJ Harvey (le clip était magnifique, très sobre), cette chanson est, il me semble, une reprise d'un air traditionnel, dont la mélodie sera réutilisée, sur l'album, pour The Curse Of Millhaven (les vocalises des refrains), en plus vif cependant. C'est une des chansons les plus connues de l'album avec Where The Wild Roses Grow, et c'est une des plus belles avec, ben, justement, celle que je viens de citer, mais pas seulement. C'est triste, mélancolique, déchirant, beau à pleurer, mais, on s'en doute, ça parle de sujets pas forcément très romantiques (ou alors, dans le sens gothique/douleur/mort du terme) !

Lovely Creature : Ah, la chanson qui me plaît le moins ici, bien qu'elle soit très belle dans un sens. Mais je n'aime pas trop les vocalises féminines (de je ne sais plus trop qui, mais ce n'est ni Kylie, ni PJ en tout cas), que l'on entend quasiment sur tout le disque. Sinon, la chanson, encore une fois, parle d'un drame, un homme découvrant l'amour au travers de la mort...Pas vraiment de la nécrophilie, en fait, mais un homme se rendant compte, une fois la femme décédée, qu'il l'aime vraiment...Oui, glauque (la musique est assez spéciale)...

Where The Wild Roses Grow : Sublime chanson en duo avec Kylie Minogue (qui partage, avec Nick Cave, la nationalité australienne). Une chanson inspirée par un air traditionnel, et qui deviendra un tube, une chanson juste imparable et magnifique malgré son sujet on ne peut plus glauque (une jeune femme, qui raconte l'histoire, est séduite par un homme, qui raconte aussi l'histoire, et un jour, est conduite, par lui, près d'une rivière, où poussent les roses sauvages. Là, il la tue à coup de pierres). Musicalement, c'est admirable, et on peut dire sans hésiter que jamais Kylie Minogue (chanteuse que je n'aime pas, en gros...) n'a jamais aussi bien chanté. Puissant.

The Curse Of Millhaven : Musicalement parlant, cette chanson assez longue (presque 7 minutes) est la plus légère de l'album. Elle raconte l'histoire d'une fille, Loretta, qui vit dans le village de Millhaven, et qui, un jour, va y faire un carnage, tuant un grand nombre de personnes. Environ 25 personnes ; c'est la chanson (de l'album) qui possède le plus grand nombre de morts violentes !! Avec sa musique qui reprend l'air déjà utilisé dans Henry Lee, avec son chant à la limite de l'hystérie et son humpur frappadingue, cette chanson est une vraie réussite, bien décalée !

The Kindness Of Strangers : La pauvre Mary Bellows, qui fait trop confiance à la gentillesse des inconnus (traduction du titre) et, un jour, se retrouve assassinée, chez elle, quatre balles dans le crâne, attachée au lit (et qui sait, elle a peut-être même été violée avant...), tuée par ce si gentil inconnu dont elle s'était épris... Ne faites pas confiance aux étrangers, tel est le sujet de cette chanson très triste, chantée d'une voix triste par Cave, avec des pleurs féminins en fond sonore, et une musique bien plombante et triste. Franchement pas la meilleure, mais on ne peut pas dire que le message ne passe pas ! C'est pas mal, bien que trop lacrymal.

Crow Jane : Excellente chanson, au rythme assez lent, à la musique assez intense et lourde, sur une jeune femme, Crow Jane, qui revient dans une petite ville (population de 48 âmes avant qu'elle n'arrive, et seulement de 28 après qu'elle reparte...), afin de se venger d'un épouvantable viol collectif dont elle fut, autrefois, victime : 20 mineurs (de fond, pas des enfants, hein !) la tronchèrent à tour de rôle? A son retour, elle se les paie, un par un, réduisant à 28 a la population de la ville...La loi du Talion à son point le plus élevé !! Très bonne chanson, sans être une des meilleures de l'album.

O'Malley's Bar : 14 minutes, la chanson la plus longue (de très très loin !) de Murder Ballads. Sans doute est-elle trop longue. En fait, non, ce n'est pas "sans doute" ; elle EST, vraiment, trop longue ! Mais O'Malley's Bar, sans être une des meilleures de l'album, à cause, justement, de sa longueur, est intéressante, et raconte l'histoire d'un homme qui, un soir, fait un carton dans un bar, assassinant, par arme à feu, tout le monde dans le bar, clients, employés, et on ne sait pour quelle raison. A la fin, il se fait arrêter, il se rend, et on le devine complètement fou (il compte, lentement, sur ses doigts, ses victimes)... Un orgue assez omniprésent, parfois chiant, mais musicalement, bien que redondant, ce morceau est pas trop mal. Juste vraiment trop long !

Death Is Not The End : Une reprise d'une chanson de Bob Dylan, sur laquelle participent, chacun sur un couplet, PJ Harvey, Kylie Minogue, Shane McGowan et Blixa Bargeld (guitariste allemand des Bad Seeds). La chanson de base, de Dylan, est de 1989 (sortie en face B d'une chanson issue de Oh Mercy). C'est une très bonne chanson, peu connue, dont la reprise, ici, est même meilleure que l'originale. Une manière magnifique et très apaisée (et apaisante) d'achever un album au demeurant assez glauque. Ici, on nous explique, en final de ce disque violent et mortifère, que la mort n'est pas une fin en soi, assez réconfortant après les dérives sanguinolentes des précédentes chansons, non ?

En résumé, on a ici un disque remarquable, 58 minutes en tout, dont une chanson, on l'a vu, terriblement longue. Assez froid et sombre, Murder Ballads n'en demeure pas moins, sans aucun doute, l'album le plus accessible de la très complexe et inclassable discographie de Nick Cave & The Bad Seeds. En tout cas, pour moi, leur meilleur, et mon grand préféré aussi !