Chronique rédigée avant le décès de Christophe.
L'autre jour, j'ai (enfin, dirons-nous) réabordé le cas, super passionnant, d'un album de Christophe, Les Paradis Perdus. Un album sorti en 1973, court et grandiose (enfin, je ne vais pas revenir dessus sauf une chanson vraiment nulle). Il me semble avoir dit, dans la chronique, que j'en profiterai pour réaborder, dans la foulée, un autre de ses albums, je viens donc ici pour mettre cette menace à exécution, ah ah ah. Mais pas n'importe quel album. J'ai choisi celui qui, au final, après mûre réflexion, est probablement mon préféré du chanteur, un album sorti en 1976 sous une pochette qu'autrefois que jugeais, ici (dans l'ancienne chronique) super belle, et que, maintenant, je trouve juste bien jolie. Une pochette bien dans le ton de celles des précédents albums de Totophe (enfin, pas des Mots Bleus, mais clairement de celles des Paradis Perdus et du live Olympia), un dessin bien coloré sur lequel on voit (pochette ouvrante) trois représentations du chanteur, visage fermé, mais aussi un samouraï à terre, son sabre à la main, et quelques bâtiments dont deux qui semblent faits de tubes ou boîtes de conserve. A l'intérieur, sur fond bleu profond, les paroles des chansons (il manque celles du troisième titre, au passage). L'album s'appelle Samouraï, il a été enregistré à Ferber (Paris) avec les musiciens habituels de Christophe (''Bunny'' Rizzitelli, Dominique Perrier, Didier Batard, Patrice Tison) qui joue un peu de piano, et il marque la première et je crois unique collaboration entre le chanteur et le parolier Boris Bergman, futur collaborateur d'Alain Bashung (entre 1978 et 1981, puis 1986/1989) notamment.
Verso de pochette vinyle
Disque ayant obtenu peu de succès à sa sortie, Samouraï est un album court, 29 minutes (pour 8 titres). Peu de succès, c'est hélas un peu l'histoire de la vie de Christophe dans les années 70. Lui qui, ancienne gloire de la chanson française dans les années 60, est revenu au début des années 70 après des années de disette connaîtra certes un succès monumental (et mérité) en 1974 avec son album Les Mots Bleus (deuxième collaboration avec Jean-Michel Jarre, qui signe les paroles) et ses deux chansons Les Mots Bleus et Senorita, mais en dehors de ça... Totophe, comme Nino Ferrer, a continue son petit bonhomme de chemin, comme résigné devant le manque de vraie reconnaissance du public. Son double live de 1975 s'est, je pense, bien vendu, car l'effet Les Mots Bleus était encore là, mais au moment de sortir Samouraï en 1976, le grand public l'avait presque, à nouveau, oublié. Pourtant, Samouraï est, malgré une ou deux petites fautes de goût (et encore) résidant dans son ultime morceau et dans un passage d'un autre morceau, un des plus beaux albums de chanson française de son époque. Un disque qui flirte pas mal avec le rock progressif (tout comme on trouvait d'éminentes traces de progressif dans les arrangements de ses chansons sur le double live de 1975), et offre notamment un morceau de 11,30 minutes découpé en trois parties (aussi bien en vinyle qu'en CD, c'est sur trois plages audio), Pour Que Demain Ta Vie Soit Moins Moche, qui occupe quasiment toute la face B. Synthés vaporeux, magnifiques guitares, atmosphère onirique, c'est sublime. OK, les paroles sont, parfois, à la limite du hors-jeu (un petit peu ridicules parfois), sur cette trilogie de morceaux comme sur l'ensemble de l'album, mais, tout de même...
Et que dire du morceau-titre, Samouraï, sorti en single il me semble, et qui, si elle n'est pas une des plus connues de Christophe, est néanmoins une de ses plus belles (j'aurais cependant préféré que l'accélération finale - J'en ai jusque là... - ne soit pas présente, elle vient un peu gâcher le reste du morceau)... Que dire de ce charmant petit hommage aux Beatles (que Christophe a écrit tout seul, sans Bergman), Merci John D'Être Venu ? De Tant Pis Si J'En Oublie, sorte de plage de remerciements et d'hommags chantés (les paroles manquent sur la pochette pour ce morceau un peu particulier), sorte de déclamation listée qui me fait un peu penser au God de Lennon ? ...Paumé est une belle chanson méconnue, triste comme un jour sans musique (Fais juste semblant d'aimer, j'ai besoin de recoller un coeur qu'en a trop bavé), et si Le Cimetière Des Baleines vient un peu foutre en l'air la magie onirique de la seconde face avec son rythme frénétique, c'est tout de même une chanson plutôt correcte, pas la meilleure ici, mais pas une merde. Je ne sais pas trop pourquoi c'est ce disque et pas Les Paradis Perdus ou Le Beau Bizarre (un album extrêmement court - 26 minutes ! - et incroyablement grandiose, mais difficile à aimer au premier abord en raison de la manière qu'à Totophe de chanter dessus, presque volontairement faux, sorti en 1978), qui est mon préféré de lui, mais le fait est là, Samouraï est sans doute le Christophe que je réécoute le plus souvent. C'est vraiment une merveille de chanson française un peu rock, assez progressive, avec une ambiance bien à lui, bien particulière. Sorti dans l'indifférence, le disque va mourir dans les bacs à soldes, et c'est vraiment dommage. Il ne sera réhabilité que bien des années après, si tant est qu'il le fut vraiment...
FACE A
Samouraï
Merci John D'Être Venu
Tant Pis Si J'En Oublie
...Paumé
FACE B
Pour Que Demain Ta Vie Soit Moins Moche (1ère Partie)
Pour Que Demain Ta Vie Soit Moins Moche (2ème Partie)/Les Dragons De Mes Chimères
Pour Que Demain Ta Vie Soit Moins Moche (3ème Partie)
Le Cimetière Des Baleines