Roxy Music - Siren

Bon, je suis un tantinet emmerdaillé, là.. Je m'explique. Autrefois (en 2010), j'avais écrit une chronique pour le moins dithyrambique sur cet album, et au fur et à mesure que les années se sont écoulées, je dois dire que mon avis sur ledit album a pas mal évolué. Et, vous vous en doutez, pas vraiment en bien. Cet album, j'avais donc envie de le réaborder en disant vraiment, sincèrement, ce que j'en pense, et j'espère que je ne vais pas être trop méchant pour rien non plus, car, paradoxal, je ne le déteste pas pour autant, ce disque. Il s'agit du cinquième album studio de Roxy Music (ce qui est fièrement indiqué au dos de pochette : dès le deuxième album, le groupe indiquait, au dos où à l'intérieur de leurs pochettes, 'The second...', 'The third...', 'The fourth...', 'The fifth Roxy Music album'), il date de 1975, et il s'appelle Siren. Sa pochette est aussi glamour que celle des précédents opus (une constante chez le groupe : des pochettes classe, glamour, sexy, qui frappent le regard) et montre Jerry Hall, future ex-Mme Jagger et à l'époque petite amie de Bryan Ferry (chanteur du groupe), à moitié dénudée, en sirène sur les rochers couverts de mousse, apparemment la photo fut prise par une température polaire et la belle se les pelait grave. Ce qui se ressent un peu à voir la photo (teintes bleues de la photo, décor froid, on sent qu'effectivement, la photo n'a pas été prise en été), mais pas en regardant Jerry Hall. Par rapport à la pochette de Country Life (1974), le précédent opus, qui montrait deux jeunes femmes quasi nues, devant des lauriers, posant en aguicheuses avec les mains hélas trop bien placées, c'est moins percutant, mais c'est plus classe (Country Life eut droit à de nombreux problèmes de censure). C'est la dernière pochette d'album studio aussi classe pour le groupe, dans un sens.

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Dos de pochette

Et le dernier opus studio du groupe pour une période de quatre ans. Après la tournée de Siren, qui s'achèvera en 1976 et sera illustrée par le live Viva ! (court mais génial), le groupe se mettra en hiatus, et ça durera jusqu'à 1979. Ils reviendront pour Manifesto, puis Flesh + Blood (deux albums moyens), puis Avalon (1982) qui sera remarquable, et ensuite, rideau, après un single à succès (une reprise du Jealous Guy de Lennon que je trouve limite meilleure que l'original, désolé pour le blasphème, d'autant plus que j'adore Lennon). A sa sortie, ce disque très formaté (43 minutes, 9 titres, pochette simple sans artifices, pas de sous-pochette particulière) sera un beau succès, boosté par le single Love Is The Drug qui ouvre le bal et est, effectivement, une putain de grande chanson. Siren a été qualifié, aussi, à sa sortie, de meilleur album du groupe, l'épitomé du son roxymusicien, une perfection de glam arty et pop. Jamais Bryan Ferry n'aurait aussi bien chanté, jamais Phil Manzanera (guitariste) n'aurait aussi bien joué, toussa, bla bla bla... J'ai longtemps été de cet avis, et je continue de penser qu'effectivement, les différents membres de Roxy Music (citons aussi Paul Thompson à la batterie, Andy Mackay au saxophone et hautbois, car il y à un hautbois dans Roxy Music, et Eddie Jobson au violon et claviers, plus le bassiste John Gustafson, pas officiellement membre du groupe) sont en état de grâce (de Monaco) ici, ils jouent effectivement super bien, et Ferry (claviériste à ses heures perdues, aussi) chante super bien. Mais, mais, mais...

Mais.

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Pub américaine (en témoigne le label, ATCO, alors qu'en Europe, le groupe était pressé chez Island) d'époque

Mais je pense quand même que Siren n'est pas aussi quintessentiel qu'on voudrait nous le faire croire. J'ai en fait l'impression d'une stase, ici, le groupe est presque au niveau du précédent opus, lequel était déjà vraiment supérieur au précédent (Stranded, 1973, premier opus sans Eno), lequel n'était pas supérieur aux précédents, lui, en revanche (mais valait quand même le coup). Siren est un putain de très bon album de glam-pop à tendance arty, mais pas un album aussi exceptionnel qu'on le pense. Le groupe n'a pas réussi, selon moi, à surpasser l'album de 1974. Sincèrement, sur les neuf chansons, trois deviennent progressivement assez usantes à force, et toutes sont sur la face B (laquelle est nettement plus longue que la A) : She Sells, Could It Happen To Me ? et Nightingale. Ces trois chansons, qui totalisent, allez, 11 minutes, ne sont pas mauvaises, mais un peu mineures, presque insipides à la longue, surtout le très nerveux (en tant qu'ouverture de seconde face, il remplit, ainsi, parfaitement son office de 'relanceur d'action') She Sells. La mélodie répétitive et cyclique de Nightingale lasse un peu. Could It Happen To Me ?, c'est pire, je ne me souviens quasiment jamais de sa mélodie avant de le réécouter, ce qui n'arrive que quand je me réécoute l'album en entier. D'ailleurs, à ce sujet, autant il m'arrive souvent d'écouter des chansons éparses issues des différents albums du groupe, autant, mis à part Love Is The Drug, je n'écoute jamais une chanson de Siren séparément de l'album entier. Jamais je ne me suis dit tiens, si je me réécoutais End Of The Line ou Both Ends Burning (malgré que cette chanson soit extraordinaire) aujourd'hui ?, et Siren n'est pas l'album du groupe que je réécoute le plus souvent, cet insigne honneur revient à Country Life. Et même le groupe semblait avoir négligé ce disque : sur Viva ! il n'y à qu'un seul titre de Siren de joué (alors que c'était le plus récent de leurs albums), Both Ends Burning. Et sur l'autre live, Heart Still Beating (tournée de 1982, mais live sorti, il me semble, en 1990), il y en à deux : Both Ends Burning et Love Is The Drug

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Regardez-moi c'que mon filet a ram'né, aujourd'hui !

Comme si les autres morceaux étaient de la merde couchée sur vinyle. Alors que non. Siren, musicalement, offre du grandiose, et du très bon, rien de mauvais. C'est juste qu'on est un peu déçu, en l'écoutant, devant la légère inertie de l'ensemble, on aurait aimé plus de folie, Country Life avait son morceau en partie chanté en allemand, il en avait un qui cacophonisait à donf' et avec jubilation (All I Want Is You), un autre qui faisait très médiéval, un autre assez country... Ici ? De la pop glamour, point barre. Difficile de se dire qu'Eno a un temps fait partie du groupe, difficile de se dire que le guitariste du groupe, Manzanera, la même année, fera son incroyable (faut que je l'aborde ici, d'ailleurs) Diamond Head sur lequel Eno et quasiment tout Roxy (Ferry excepté) joue... Love Is The Drug, avec sa basse de folie, est une tuerie totale, Both Ends Burning est grandiose mais le sera encore plus en live, Just Another High, bien qu'un peu long, est un final qui accroche l'auditeur, Sentimental Fool, bien que lui aussi assez long, est original, Whirlwind et End Of The Line sont excellentes. Le este est très très correct. Mais seulement deux chansons sont du niveau de celles des deux premiers opus ou de Country Life, le reste est du niveau de Stranded, c'est à dire un bon niveau mais qui laisse quand même un peu de place pour l'amélioration. On se console en se disant que les deux albums studio suivants (malgré un morceau-titre infernalement génial sur Manifesto et deux excellents morceaux sur Flesh + Blood : Same Old Scene et My Only Love) seront nettement inférieurs (mais alors, nettement !), mais en revanche, je pense qu'Avalon est meilleur que Siren, oui, je sais, désolé mais je le pense sincèrement. Un album que les fans ne doivent pas négliger, et les néophytes aussi, mais le meilleur ? C'est subjectif, je sais, mais...pas pour moi. Plus pour moi. 

FACE  A

Love Is The Drug

End Of The Line

Sentimental Fool

Whirlwind

FACE B

She Sells

Could It Happen To Me ?

Both Ends Burning

Nightingale

Just Another High