TMM

Avertissement : cette chronique contiendra quelques termes en allemand, langue que je ne parle pas, mais je me suis amusé, nationalité du groupe oblige, à parsemer, tels des grains de sésame, ce texte de termes en allemand, à vous de chercher sur le Net leur signification si la langue de Goethe n'est pour vous qu'un salmigondis inconpréhensible (wilkommen au club - ah, j'avais pourtant prévenu, hein !). On va donc parler d'Allemands. Kraftwerk. La centrale électrique (traduction du nom du groupe)... Quel groupe... Vraiment des précurseurs, avec leurs compatriotes de Neu ! (qui ne se prononce pas 'noeud', mais 'noyeu') et Cluster. Kraftwerk a démarré a carrière en 1969, le groupe a été fondé par Florian Schneider-Esleben (qui virera la seconde partie de son ronflant patronyme par la suite) et Ralph Hütter, leur premier album, éponyme, avec sa pochette représentant une carotte de chantier, sort en 1970. Klaus Dinger, un des membres du groupe à l'époque, s'en va rapidement fonder Neu !, justement, laissant Ralph und Florian complètement allein pour faire leur deuxième opus, Kraftwerk 2, en 1972 (enregistré l'année précédente). Puis Ralph Und Florian en 1973. Un certain Wolfgang Flür (percussions électroniques) intègre le groupe, qui enregistre son quatrième album en 1974, le remarquable Autobahn, inspiré par les autoroutes allemandes. Karl Bartos (percussions électroniques) intègre le groupe, qui enregistre, en 1975, Radio-Activity, remarquable album (le morceau-titre est inoubliable), puis le non moins remarquable Trans Europe Express en 1977, album qui, à sa sortie, est incontestablement leur meilleur, avec le morcau-titre, Showroom Dummies, The Hall Of Mirrors... 

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Rückseite der vinyl tasche

Sur scène, les zigotos se feront par la suite représenter par des automates, mais sont d'ores et déjà de vraies curiosités, se livrant rarement à des interviews, se montrant rarement, et bossant avec des méthodes assez particulières (pour les joindre, il faut les appeler à heure très fixe, c'est Hütter qui répond, et le téléphone du studio n'a pas de sonnerie ; il décroche à l'heure de l'appel tel qu'il est prévu, l'interlocuteur a donc intérêt à être ponctuel...deutsche methoden). En 1978, c'est die höhepunkt de la carrière du groupe : la sortie de The Man Machine, qui restera probablement leur album le plus mémorable, le plus majeur, encore plus réussi que le déjà grandiose Trans Europe Express sorti à peine un an plus tôt. Court (36 minutes et seulement 6 titres), l'album est porté sur le thème du futurisme et de la robotique, de la même manière que les précédents opus s'inspiraient des routes, de la radioactivité et ondes radio, et des trains. L'album est sorti sous une pochette rouge représentant les quatre Kraftwerk (Hütter et Schneider, les deux leaders, sont au centre) en chemise rouge et cravate noire, cheveux impeccablement coiffés comme des casques, posant dans l'escalier du studio d'enregistrement (Kling Klang, à Düsseldorf), avec un lettrage à la soviétique. L'influence de cette pochette est évidente : le collectivisme soviétique des années 20/30. Ca ne se ressent pas dans la musique, même si on a du russe dans les paroles du premier morceau, The Robots : Ja tvoi sluga, ja tvoi rabotnik ('nous sommes des esclaves, nous sommes des robots'). Deutsche humor. Gros succès à sa sortie, The Man Machine a été boosté par le single à succès The Model, que tout le monde ou presque, à moins d'être né il y à 12 ans ou d'avoir passé les 40 dernières années dans une grotte, a entendu au moins une fois dans sa leben

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- Florian, ta cravate n'est pas droite...

- ah, scheiße !  

Mélodie répétitive, chant atone, paroles qui parlent d'un mannequin vedette que le narrateur aime et admire (Now she's a big success I want to meet her again, tournures de phrases assez maladroites dans la syntaxe, mais le groupe est germanophone, rappelons-le, c'est déjà bien beau qu'ils aient enregistré leurs chansons en anglais comme ils l'ont fait, évidemment, en allemand). Les paroles ne sont pas la treibende kraft du groupe, d'ailleurs : dans Spacelab, Metropolis et The Man Machine, on a très peu de paroles, des répétitions des titres des chansons en fait, d'une voix atone ou robotisée (Spaaaaace...laaaaab...). Ce sont les mélodies, répétitives, électroniques, futuristes, et totalement eindringliches, qui sont à retenir. The Robots, Neon Lights (9 minutes vraiment imposantes), Spacelab, The Model, il faudrait tout citer, sont des morceaux parfaits, remarquablement bien produits et interprétés par les quatre männer en costards. C'est un des meilleurs albums de musique électronique, un des meilleurs albums de krautrock aussi (avec le premier et le troisième album de Neu !, Tago Mago et Ege Bamyasi de Can, Yeti d'AMon Düül II et Sowiesoso de Cluster), même si ce n'est plus exactement du krautrock, c'est vraiment de l'électro, tout simplement. La suite de la carrière de Kraftwerk sera interessant (oui, en allemand, c'est le même mot), mais quand même, pour moi, le meilleur album du groupe, leur point d'orgue, c'est cet album indépassable de 1978. Pas une année exceptionnelle, au passage, pour la musique, mais The Man Machine en est un des meilleurs crus.

FACE A

The Robots

Spacelab

Metropolis

FACE B

The Model

Neon Lights

The Man Machine